dimanche 30 mai 2010

Rien ne sera jamais irrémédiable

Ce dimanche m'a libéré d'un poids si lourd, j'avais si peur de le revoir, j'aurai dû savoir pourtant qu'"entre nous deux rien ne sera jamais irrémédiable". Il me l'avait dit un jour après un échange vif qui avait dégénéré; nous nous étions quittés - c'était encore au téléphone cette fois-là - fâchés et c'est lui qui m'avait rappelé pour me dire cela, cette phrase que j'avais trouvé belle : entre nous deux rien ne sera jamais irrémédiable. C'était une phrase comme un mot doux, de ces mots doux qu'entre frère et soeur on est incapable de prononcer. On s'est quittés ce soir en s'embrassant comme d'habitude sur les deux joues mais il m'a pris l'épaule et j'ai tapé sur la sienne en le regardant dans les yeux en souriant. On s'est compris. Ah mon frangin ce qu'on peut être cons tous les deux! Courage pour ta nouvelle chimio (bordel chié de merde) (Pardon maman pour les gros mots).

10 h 30. Sur la route j'écoute Dennis Hopper une rediffusion sur France Inter d'un entretien avec l'artiste. Un beau moment quand il parle de Rainer Maria Rilke et de Lettres à un jeune poète, "un livre qui a changé ma vie" dit-il.

Rentrez en vous-même
Cherchez la raison qui au fond vous commande d'écrire
Examinez s'il déploie ses racines jusqu'au lieu le plus profond de votre coeur
Reconnaissez-le face à vous-même
Vous faudrait-il mourir s'il était interdit d'écrire?
Ceci surtout,
Demandez-vous à l'heure la plus silencieuse de votre nuit,
Dois-je écrire?
Creusez en vous-même une réponse profonde
Et si cette réponse devait être affirmative,
S'il vous est permis d'aller à la rencontre de cette question sérieuse avec un fort et simple : je dois!
Alors construisez votre vie selon cette nécessité,
Votre vie jusqu'à son heure la plus indifférente, la plus infime, doit se faire signe et témoignage pour cette poussée.


Et Dennis Hopper commente :
Ça j'y crois! On est un artiste que si, au point le plus bas de sa vie, à la question : si on t'empêche de créer, en mourras-tu? on répond oui.

J'écoutais cela dans ma voiture. Puis comme dans chaque émission, l'invité reste seul une minute avec le micro et doit parler ou pas, de ce qui lui passe par la tête, pendant cette minute. Dennis Hopper a dit en anglais le beau poème de Kipling : Tu seras un homme mon fils...

19 h 30. Au retour je n'ai pas écouté la radio. Mes pensées se bousculaient, je me disais que je ne devais pas avoir le droit d'avoir envie de mourir parce que je suis bien vivante alors que d'autres sont malades et se battent pour ne pas mourir, et pour vivre, longtemps.

Mais s'il suffisait de se dire les choses pour que nos pensées profondes disparaissent ou de sombres deviennent lumineuses... je suis si lasse... et je me fais tant d'illusions.

23 h 45. J'écoute Miles Davis, So What...