samedi 22 décembre 2018

"Tu es toute seule. Tu es toute seule"



And did you get what
you wanted from this life, even so?
I did.
And what did you want?
To call myself beloved, to feel myself
beloved on the earth.

                                             Raymond Carver, "Late fragment"


[Alors, as-tu obtenu
ce que tu voulais de cette vie, malgré tout?
Oui.
Et que voulais-tu?
Qu'on m'appelle bien-aimé, et que je me sente
bien-aimé sur la Terre]

                                              Tiré de l'ouvrage de Nuala O'Faolain, On s'est déjà vu quelque part ?

Je viens de commencer ce livre de Nuala O'Faolain. J'ouvre une page au hasard et je lis :

" Il est possible que je me fasse des idées. Ce qui importe c'est peut-être que j'aie pensé pour la première fois écrire sur moi quelques jours avant Noël. Noël est une période où nous sommes agités par de puissants sentiments. Et ce Noël allait être mon premier Noël en solitaire. Le tout premier. Il n'y avait même pas une personne spéciale que des circonstances m'auraient empêchée de rejoindre ce jour-là. [...] Je n'étais pas absolument seule, bien sûr. Je devais parler avec mes sœurs au téléphone, et j'allais recevoir d'autres coups de fil. Mais je n'étais liée à personne. À plus de cinquante ans. Je ne pouvais pas m'empêcher de revenir sans cesse à ce simple constat ni de l'affronter. Je n'étais pas malheureuse. Mais je continuais de penser - parfois avec surprise, parfois comme une simple observation, parfois prise de panique : "Tu es toute seule. Tu es toute seule."
Que s'était-il passé?
Je sais que ce n'est pas une tragédie."

Ô comme je vais l'aimer ce livre. 
(Charmante lectrice, qui me le fait découvrir, je vous remercie). 

mercredi 19 décembre 2018

"À insensé qui croit que je ne suis pas toi" (Victor Hugo, Les Contemplations)

C'est vrai, je confirme, j'écris de moins en moins ici. Je ne peux plus TOUT faire. Je dois faire des choix.
Écrire, peut-être demain? Pour dire quoi? Ce que j'ai fait aujourd'hui? 
Je peux le dire maintenant !

Ce matin.
10h. J'écoutais la troisième émission de la semaine dans Les Chemins de la Philosophie. Sujet de la semaine : L'attente. Quel programme. Attendre c'est un peu espérer, espérer que quelque chose va se passer (sauf que là c'est un Condamné à mort qui attend, il attend la mort). Moi Je, n'attends plus rien, tout est joué. Même la mort je ne l'attends pas. Surtout elle. Tsss! Elle ne me prendra pas, c'est moi qui l'inviterai, quand je déciderai (sauf accident). L'amour? Je ne l'ai jamais attendu, il s'est toujours présenté quand je ne l'attendais pas. C'était chouette... chez Laurette;-)). A propos de moi je, revenons à l'émission de ce matin, avec Victor Hugo. Ces mots avaient un sens (même sans être un Condamné à mort) :
"[...] est-ce que je puis avoir quelque chose à dire, moi qui n'ai plus rien à faire dans ce monde, et que trouverais-je dans ce cerveau flétri et vide qui vaille la peine d'être écrit?"
Je vous laisse plancher là-dessus, mon cerveau est flétri, comme ma peau. Mmm !

11h30.  La pluie s'est arrêtée, un rayon de soleil, vite courons - à pied - à la pharmacie chercher les médicaments prescrits, que je laisse dans un tiroir pour plus tard. Médiathèque, ma réservation est disponible, un film de Sara Forestier M, j'emprunte aussi Dersou Ouzala de Kurosawa que j'ai envie de revoir (2h20, épatant pour le 24 décembre).  (Hier j'ai vu au cinéma le film bouleversant de Hirokazu Kore-Eda, Une affaire de famille. Magnifique).
Il pleut. J'entre à Monoprix, je prends dans le rayon : crème de nuit anti-rides (c'est du pipeau), crème de jour et BB crème teintée; je vais à la caisse, il est midi queue pas possible; je vais remettre les crèmes en place. Je hais L'ATTENTE.
Je pars sans mes crèmes sous la pluie, un bus arrive, je le prends pour seulement deux stations, tant pis.

13h. Je mange un potage, un yaourt au muesli, un kiwi. Café - un carré de chocolat. J'écoute les infos sur France Inter? Référendum, pas référendum?  Etc. etc. Comme Clément Rosset JMFDT.

Cet après-midi.
14h. Je traîne. Je n'ai pas encore fait mon lit ni la vaisselle. La la lère. Je regarde le ciel, il se dégage un peu. Je décide d'aller à la déchetterie, j'en ai assez de voir mon couloir encombré d'un grand support en bois pour plante, pourri; un pot de peinture vide mais avec des restachou (mot breton qui signifie  les restes d'un repas), un appareil  à jet dentaire qui ne fonctionne plus, des bouteilles vides.  J'en profiterai pour aller quelques kilomètres plus loin prendre un bol d'air près de l'océan.

Et voilà : L'océan, mon amour.




Ce soir.
Une charmante lectrice m'écrit. Elle s'étonne que je n'écrive pas (plus). Alors, voilà, ce soir j'ai fait ce billet pour elle. Je crains qu'il ne soit pas "inspirant".
Avant de le commencer, j'étais en train de lire ces lignes :

"A relire la plupart de ces notations éparses, il a perdu la raison que peut-être il n'eut jamais de les mettre noir sur blanc. Qu'il les y ait mises toutefois et maintenues laisse conjecturer qu'elles répondirent en leur temps à quelque nécessité réelle, pour obscure qu'elle lui paraisse aujourd'hui, ne plus comprendre ce qu'on a voulu dire pouvant être le signe qu'on a dit l'essentiel, comme aussi bien la preuve d'une inaptitude à le formuler en termes intelligibles."

Louis-René des Forêts, in Ostinato, éditions Mercure de France, 1977.