dimanche 28 avril 2013

Voie rapide ou cimetière : dilemme cornélien


"Pourquoi Georges, me suis-je dit quand je l'ai eu appelé vers dix heures quarante-cinq, et d'ailleurs pourquoi qui que ce soit, je devrais y aller seul, ce n'est évidemment pas Georges ni personne qui peut me conseiller sur la question d'un appartement au bord de la voie rapide, même avec la Seine devant, avec la statue de la Liberté, en plus, me suis-je souvenu, qui avait été d'abord le vrai problème, et à quoi je repensais pour me rassurer et occulter le problème de la voie rapide, encore que la statue de la Liberté reste un vrai problème, ai-je pensé, et je doute que Georges puisse avoir là-dessus une opinion définitive, qui a vécu des années au bord d'un cimetière, me suis-je dit, et dont la sensibilité diffère évidemment de la mienne, notamment en amour, me suis-je dit encore. Quoique ça n'ait pas de rapport, ai-je conclu, et de toute façon c'est fait, je viens de l'appeler. [...] Georges pouvait se libérer, donc, je lui avais simplement dit que j'appelais l'agent immobilier avant de le rappeler, lui, pour confirmer. J'aurais évidemment dû faire l'inverse, mais j'avais eu absolument le besoin de me rassurer d'abord en sachant que je ne verrais pas l'appartement seul.[...]

Je me suis retrouvé à attendre Georges sur le trottoir devant l'appartement de l'avenue de Versailles, donc, dans ce paysage urbain complètement déséquilibré par l'imposante Maison de la Radio, face à laquelle, du reste, à l'angle des rues Boulainvilliers et Gros, qui convergent vers la place Clément-Ader, où tout fiche le camp dans une orgie de ciel à laquelle s'invitent les tours dépareillées du front de Seine, j'avais directement vue sur un restaurant en forme de bunker, et décidément ce coin de Paris me semblait, comment dire, au bord du chaos ou de l'indécision, voilà, ce quartier me semblait instable, où Georges est arrivé avec dix minutes de retard, cinq minutes après Sam, qui en avait cinq, elle, une femme par conséquent, une femme magnifique, du reste, comme il en existe quelques centaines en cherchant bien sur la rive gauche et même sur la droite, longues jambes, ovale parfait, grands yeux, singularité en prime dans l'ossature du visage, singularité également dans l'expression, quelque chose du côté de la bouche et même du regard, filtrant mais pas à l'excès, intéressant en somme, voire captivant, [...]
[...]
[...]
[...]
Tu ne t'es pas beaucoup exprimé sur l'appartement, ai-je dit. Il y avait un taxi libre, à la vitre duquel Georges s'est penché. [...] On pourrait le prendre à deux, a dit Georges. Excuse-moi, ai-je dit, de quoi tu parles? De l'appartement, a dit Georges en ouvrant la portière.
[...]
[...]
J'ai réfléchi à ça ensuite. Je ne dirais pas que j'étais horrifié, mais je n'étais pas certain de pouvoir cohabiter avec Georges. En même temps, j'appréhendais un peu l'avenue de Versailles. Le problème était de savoir si Georges se révélerait rassurant. Il risquait surtout de se révéler invivable.
[...]
Je n'oubliais pas l'aspect symbolique. Je ne me voyais pas signer un bail avec Georges. Je ne voulais rien d'officiel avec lui. [...] Au demeurant, il avait peut-être lancé ça comme ça. Je me suis demandé s'il allait m'en reparler. J'avais connu des situations semblables. Des gens qui disent qu'ils viennent et qui ne viennent pas. Des avenirs sans avenir, esquissés dans des phrases. Je procédais à l'inverse. Ça pouvait devenir contraignant. D'autant que parfois les conditions changent. Il m'était arrivé sur la base d'un engagement ancien, de débarquer dans une situation neuve. Je pense à la promesse par exemple, de se rendre à une fête qui, au dernier moment, se révèle déguisée. Le problème n'étant plus qu'il faille se déguiser que l'émergence de la conscience que vous vous êtes engagés auprès de gens qui se déguisent. Vous les connaissiez mal. Pas assez, à l'évidence. En un sens, c'est votre faute. [...]
[...]
[...]
J'ai discuté après avec Georges. Il était partant pour que je prenne l'appartement. Pour y vivre lui aussi, a-t-il précisé. ce que je te propose, a-t-il développé, c'est simplement d'être là. De voir comment ça évolue. Comment ça évolue quoi? ai-je dit. Je ne sais pas, a dit Georges. Toi. Nous. Les voitures, a-t-il ajouté. Le bruit. C'est trompeur, le bruit.
[...]
[...]
[...]
C'est évidemment lui qui me freinait [...] mais sa mèche, aussi, ai-je pensé soudainement, sa mèche qui ne m'avait jamais gêné jusqu'à présent mais qui, dans le cadre de notre cohabitation, menaçait de me rendre à peu près fou, qui lui venait sur la tempe droite, me suis-je tout à coup souvenu, coupée droit à l'horizontale, et qui par la force des choses se révélait perpétuellement instable, qu'il ramenait à intervalles réguliers sur la droite, là où elle tombait au repos. En fait, ai-je, constaté, la mèche de Georges, dont je ne me suis jamais soucié, j'ai commencé à la voir à dater de ce jour où il a pris de mes nouvelles au téléphone, sans évoquer la perspective de notre cohabitation, et c'est moi qui ai pensé qu'il attendait que je l'évoque, cette cohabitation, et qui dès lors ai pris conscience de sa mèche, et ne l'ai pas supportée. Même en vacances, me suis-je souvenu, la mèche de Georges ne m'avait jamais choqué, qu'il enfermait, il est vrai, le plus souvent sous une casquette, et, quant à Paris, je ne l'ai jamais vraiment remarquée, me suis-je dit, il a fallu ce coup de téléphone. Mais ça passera, me suis-je dit, et d'ailleurs ceci est mon choix, d'emménager au bord de la Seine, provisoirement avec Georges, sa mèche et le reste, s'il y a un engagement que je prends, c'est bien celui-là, et j'ai contacté une série de déménageurs à qui j'ai demandé des devis. J'ai choisi le plus cher, avec l'option emballage, je ne toucherais à rien, et j'ai rappelé Georges."

Pages 59 - 60 - 69 - 70 - 71 - 92 - 118

Christian Oster, in En ville, éditions de l'Olivier, 2013.

"Le désordre semble être le moteur de ce roman où le passage du temps inquiète, où la mort et l'humour, où ce qui advient oblige à des glissements, à des aménagements, à des choix opérés dans l'urgence. Christian Oster saisit ses personnage à l'instant précis où leur vie bascule et les précipite face à eux-mêmes."
Christian Oster a publié quinze romans, dont Mon grand appartement (prix Médicis 1999), Une femme de ménage (2001), Dans la cathédrale (2010), parus aux Editions de Minuit, et Rouler (2011), paru aux Editions de l'Olivier.

4e de couverture.

C'est le troisième ouvrage que j'ai lu ces dernières semaines de cet auteur; j'ai retrouvé ce ton que j'aime, où l'humour, l'absurde, la mélancolie se mélangent; ses descriptions des petits riens du quotidien qui nous parlent de l'essentiel : "la perte, la peur, la solitude, l’amitié, l’espérance de l’amour et l’acceptation détachée de nos ratages incessants."  Je n'ai qu'une envie, en lire un autre... Me mettrai-je à aimer les romans? Existentiels, oui.
Christian Oster était l'invité de Kathleen Evin sur France Inter le 7 mars. On peut l'écouter ici.

samedi 27 avril 2013

***

Et là, je ne rêve pas!
Pendant le tournoi PGA tour à la Nouvelle Orléans.
Scène insolite en Louisiane, où un alligator amputé d’une patte s’est invité sur un parcours de golf en plein tournoi, le PGA Tour Zurich Classic.



 
"La vigilance est de mise dans le golf. Lors d’un tournoi, il faut savoir faire attention aux arbres, aux bunkers de sable, aux points d’eau… et aux alligators, nouveaux obstacles naturels à éviter soigneusement.
Du moins en Louisiane, où l’un de ces reptiles, long de plus de deux mètres, a voulu tâter de la balle blanche en surgissant sur le parcours.
Au trou n°14 du PGA Tour Zurich Classic, à la Nouvelle-Orléans, un lac infesté d’alligators constituait la principale difficulté pour les joueurs, surtout lorsqu’un des croco ressent une envie de se dégourdir les (trois) pattes.
Sur trois pattes, la bête a été raccompagnée par un officiel en voiturette.
L’histoire ne dit pas si Lacoste et Haribo sponsorisaient le tournoi."

(Source Direct matin)

***


 Cette nuit.
J'étais dans une drôle de chambre, un grand drap blanc servait de cloison. Je me couchais, je me sentais en paix.  J'avais ramené mon drap jusqu'au cou. Puis j'éteignais la lumière. A ce moment où la lumière fut éteinte, une explosion enflamma la pièce. Je me laissais aller, je ne sentais rien, sur, ni dans mon corps. Je partais dans une espèce de voyage en ballon avec ce bruit sourd de la montgolfière  qui démarre mais je ne sentais pas de brûlure; juste une chaleur enveloppante très agréable. Je me sentais partir et je me suis dit : pourvu que ton ordinateur soit pulvérisé, tu as oublié de détruire ton journal.

jeudi 25 avril 2013

Journal

Lundi 22 avril.
Je cherche un hôtel, je tombe sur une pub!


 
Réservations confirmées. Départ après tous les ponts du mois de mai.
C'est fait, vais penser à autre chose. A faire le vide. Etrange de faire le vide quand tout n'est que vide autour de soi.
Après-midi, acheté une plante et des petites fleurs. Foule à la jardinerie, les gens sont courageux et remplissent leur coffre de voiture de plantes qu'il va leur falloir mettre en terre ou dans des bacs, des pots. Quelle corvée!
Il pleut. Ferai la mise en pot demain.
Soirée télé : Le septième juré avec Jean-Pierre Darroussin dans le rôle d'un salaud presque sympathique. Excellent.

Mardi 23 avril.
Au réveil, comme chaque matin, cette question : c'est quoi mon programme aujourd'hui?
Après-midi : golf. Ciel couvert mais température en hausse.
Au retour : mise en pot de la plante.



Dans un mois elle sera comme ça...

... puis dans trois mois comme ça! Vous jure...
 
Mercredi 24 avril.
Matinée : rien qui vaille d'être dit.
Après-midi : non plus. Une balade en ville, cette moto que je photographie; je trouve la couleur horrible....
 
 
... ça me rappelle des souvenirs!
 
 
Au Mont Ventoux ("photoshopée"). Septembre 2003.
Il y a dix ans? C'était hier!
 
Fin d'après-midi : Lecture, Les Faux-Monnayeurs (André Gide)
 
"Monsieur Profitendieu gagna, en chancelant, un fauteuil. Il eût voulu réfléchir, mais les idées tourbillonnaient confusément dans sa tête. De plus, il ressentait un petit pincement au côté droit, là, sous les côtes; il n'y couperait pas : c'était la crise de foie. Y avait-il seulement de l'eau de Vichy à la maison? [...] Il respire fortement et à chaque expiration exhale un "ah! mon Dieu!" rapide et faible comme un soupir. Sa douleur au côté se confond avec sa tristesse, la prouve, la localise. Il lui semble qu'il a du chagrin au foie. Il se jette dans un fauteuil et relit la lettre de Bernard. Il hausse tristement les épaules. Certes elle est cruelle pour lui, cette lettre; mais il y sent du dépit, du défi, de la jactance."
 
Soirée : lecture, suite...
 
Puis à 23 heures 15, couchée, je m'apprêtais à poursuivre mes Faux-Monnayeurs, ma radio était alors allumée et j'entendis une lecture d'une Correspondance qui a retenu mon attention. Captivée, bien calée dans mes oreillers, j'ai écouté la comédienne Dominique Reymond lire ces lettres de Grisélidis Réal, jusqu'à minuit. 
"A travers ces lettres à l'écrivain Maurice Chappaz, au peintre Henri Novarraz, aux éditeurs Bertil Galland et André Balland, à Jacques Vallet, à la photographe Suzi Pilet, à son amant Hassine Ahmed, se dessine le parcours singulier de cette femme, qui fut à la fois écrivain et prostituée, et dont l'œuvre est aujourd'hui éditée chez Verticales."
C'était magnifique. Une découverte.
 
Jeudi 25 avril.
Réveil : que vais-je faire aujourd'hui?
Matinée : ciel bleu, pas-un-seul-nuage! Je traîne... mails... revue de blogs...
Midi : envie de crevettes! Hop! je file en acheter.
Premier déjeuner de l'année sur la terrasse. Miam! Je profite de la pause déjeuner des ouvriers (et engins) qui font un boucan toute la journée avec les travaux qui n'arrêtent pas dans mon quartier.
 
 
Oh! Une libellule passe sous mon nez!

 
On la voit ici, le truc droit qui tombe comme une ficelle d'une branche.
Son corps a la couleur d'une salamandre
et ses ailes la transparence et la fragilité du cristal. 
Mais si : cliquer pour agrandir!
 
Bref, c'est pas beau tout ça?
Même si... ça transpire de solitude... je savoure ces moments.
Cette vie que tu trouvais si belle... je pense à toi.
 
 

mardi 23 avril 2013

Ô lettres manuscrites...

Dépoussiérage de ma bibliothèque.  Un petit livre tombe par terre, une lettre s'en échappe. Je la relis, avec émotion. De mon fidèle ami, qui ne m'a offert que des ouvrages qui m'ont touchée et fait découvrir tant d'auteurs. Ô lettres manuscrites, vous êtes irremplaçables, je vous respire, je vous serre contre mon cœur.
Et ce matin, j'étais emplie de vide. Ce n'était donc pas le hasard qui m'a fait relire cette lettre : elle m'a tellement réconfortée.


Stig Dagerman, Notre besoin de consolation est impossible à rassasier.

(Lettre publiée ici, avec l'accord de l'auteur).

23.08.2007.

Ma chère M.,
Depuis plusieurs jours déjà mon cœur commande à vous écrire, mais l’esprit simplement n’y était pas. Ce moindre mot qui, parfois, surgit comme un mot de trop…
Ainsi que vous le savez pour l’avoir éprouvé, j’en suis sûr, « notre besoin de consolation est impossible à rassasier ». Ce texte, menu mais tranchant telle une lame de poing, figure à mon chevet depuis la fin de l’adolescence. Le pessimisme qui le traverse a, inversement, la vertu d’un coup d’étrier : il stimule au cœur de la blessure, de la plaie… Je souhaite, en tout cas, qu’il sera pour vous une « heureuse » ( !) découverte !
Mon séjour en terre valaisanne fut parfois copieusement arrosé (d’eau de pluie !) ; une amie de ma sœur m’a fait l’éblouissante surprise de m’offrir un livre de Maurice Chappaz (écrivain sublime, malheureusement si rare que les librairies françaises le boudent !) dédicacé à mon intention de la main de l’auteur (lequel vit en Valais). Cette offrande très précieuse n’a pas lassé de m’émouvoir… Maintenant, de retour à N., je me replonge tant bien que mal dans mes pages broussailleuses d’orties…
Je découvre, ces  jours, un poète tchèque contemporain : Petr Kràl. Je crois que vous aimeriez sa poésie…
Pour ce qui est du C.P., il me semble que je ne revienne pas de sitôt. Mais mon humeur est si variable…
J’espère que cette lettre vous trouvera en bonne santé tant morale que physique, et pardonnez encore, chère M., mon silence de tombe. Je passe de temps à autre sur votre blog* et vous lire me redonne toujours du baume au cœur…
Je vous embrasse avec Tendresse.
D.

* Il s'agissait d'un autre blog, un Journal que je tenais sur un site qui n'existe plus.

dimanche 21 avril 2013

...

Samedi.
En sortant de la médiathèque, cet arbre... toujours aussi beau.


"Quelle vanité que la peinture qui attire l'admiration par la ressemblance des choses dont on n'admire point les originaux"
Blaise Pascal, Pensées.


"Dimanche, jour de merde par excellence".
Louis Calaferte
Cette phrase a pris son sens aujourd'hui... Hôtel complet fin mai et en juin. Peuvent pas rester chez eux les retraités?! Le seul hôtel les pieds dans l'eau... du lac. Oui, futile tristesse...

 Photo mai 2012 (Hôtel)
J'envisage toujours mes escapades comme une bouée de sauvetage, quand la noyade est imminente.

samedi 20 avril 2013

To be young, to be old...


Il faudrait que j'arrête d'écouter les émissions où on parle de la vieillesse. Même si ça m'intéresse bigrement, ça me déprime. Et qu'est-ce qui me déprime? D'entendre des personnes âgées, des vieux quoi, des vieilles, et même des vieillards, en parler avec un optimiste forcené qui m'anéantit.
"Accepter de vieillir pour vivre longtemps". Ah ah! Tant mieux, je ne vais pas faire de vieux os.
 
Sur la RTS, l'émission Babylone était consacrée toute la semaine "au vieillissement" :
. Lundi : Le jeunisme
 
Sur France Culture, hier, à 13 heures dans La Grande Table : Images de la vieillesse. Bonjour l'appétit!
 
Et je ne fais pas exprès, je tombe dessus presque par hasard. Et je les écoute, évidemment, espérant malgré tout y trouver un réconfort... "pour quand" je serai vieille. Mmm! Ben non!
 
Enfin, quelques satisfactions tout de même comme celle d'entendre la voix de Gaston Bachelard :
"Est-ce que c'est triste de vieillir Monsieur Bachelard?
- Oui, c'est triste... Vous n'allez pas mettre ça" dit-il à l'interviewer.
 
 
"La vieillesse ce n'est que la continuité de ce qu'on a été."
Gaston Bachelard
 
Et puis, entendre encore une fois Orson Welles chanter :
I know what it is to be young
But you, you don't know what it is to be old



 
 
"La vieillesse c'est la seule maladie dont on ne peut espérer guérir."
Orson Welles




vendredi 19 avril 2013

***

Photos du jour prises sur le pont qui surplombe le Port-Rhu à Douarnenez.




Déchirures de joie et moments de tristesse

Découverte du jour via le blog Carnets de Chine et d'ailleurs 
ces photos de voyage en train du photographe Wang Fuchun.
 
 
Wang Fuchun"Né en Mandchourie en 1943, Wang Fuchun fait ses études à Harbin, chef  lieu de la province du Heilongjiang, dans le nord ouest de la Chine. Diplômé de l'université de Harbin du département de photographie, il passe une bonne partie de son temps dans les trains, pour photographier ce qui l'entoure. Il est employé comme photographe pour la compagnie de chemin de fer de Harbin. Le chemin de fer est le moyen de transport le plus populaire, et surtout le plus utilisé de Chine.
 
La vie en noir et blanc

 C'est avec ces deux couleurs, que Wang Fuchun expose des hommes, des femmes, et des enfants pris à un instant T, entre fou rire, et paysages naturels. Le site China Pictorial écrit de lui, "Ses photos témoignent que certains Chinois d'aujourd'hui entretiennent toujours des relations harmonieuses avec la nature". Il a dernièrement pris en photo les peuplades du nord-est de la Chine, vivant dans un univers aux antipodes de celui de Pékin, Shanghai ou Canton.
Ces photographies montrent des sourires, malgré la rudesse de la vie. Il expose une Chine sombre et magnifique. Sombre, par son climat et paysage difficile. Magnifique, car la beauté de l'être humain ressort à chaque instant, à chaque image." Lire ici. 

 
 
 
 
D'autres photos ci-dessous extraites de Chinese on the train 
sur le site de Wang Fuchun
 



 
Les voyages en train en Chine semblent être une incroyable aventure. L'esprit zen règne, malgré la chaleur, la promiscuité, chacun acceptant ces contraintes avec philosophie. Nous aurions beaucoup à apprendre, nous Français qui nous plaignons si facilement de tout et de rien - et qui sommes si impatients et individualistes -, sur cette humanité  où doit s'exercer une entraide généreuse et chaleureuse. Je retiens de ces photos, pour la majorité, une certaine joie de vivre, de consentement (résignation? acceptation?) qui me laisse rêveuse, dans la simplicité, la générosité et une vraie poésie.  Une expérience à vivre au moins une fois comme le raconte avec humour l'auteur des Carnets de Chine.
 
"Il y a des déchirures de joie et des moments de tristesse. J'essaie de mettre tout cela dans ma lentille".  Wang Fuchun
 
Et cette autre photo, à l'enseigne de B & W
prise dans un train par un nomade sédentarisé en Chine!
 
 
Train Shanghai-Guangzhou, 2013
 
 

jeudi 18 avril 2013

De, la douceur d'un son

Je regardais une émission hier soir sur Arte sur le peintre Gerhard Richter et soudain j'ai eu terriblement envie d'entendre le bruit de ta brosse sur la toile... C'était un peu ça, en moins brutal, un son plus sourd...

(Hier soir j'avais inséré une vidéo où l'on me voyait (de dos) imiter avec ma main le bruit de la brosse. Réflexion faite cette nuit, je me suis dit : quelle erreur de me mettre en scène (ou quelle horreur, au choix:))! Tsss! Je retire donc la vidéo et j'en remets une autre, avec seulement le son. La toile que "je brosse" de la main est celle-ci : la dernière du billet Le Rouge et le Noir.)

C'est incroyable ce que je ressens : ton intime présence.





Gerhard Richter

Rajout du 20.04.2013.

"Avec 262 millions de dollars de ventes en salle, l'Allemand Gerhard Richter, né en 1932, qui était 8ème en 2011, arrache la cinquième place. En 2012, il a été porté par 36 enchères millionnaires. "Les sociétés de ventes ont misé sur le gigantesque hommage qui lui a été rendu dans toute l'Europe à l'occasion de ses 80 ans", souligne Artprice. En octobre, sa toile "Abstraktes Bild" a été adjugée 30,4 millions de dollars (toile provenant de l'importante collection du musicien Eric Clapton!). L'octogénaire est ainsi devenu l'artiste vivant le plus cher au monde. "La vente de ses oeuvres a généré plus d'argent qu'une année d'enchères en Allemagne", souligne Artprice."
(Source L'Art pour tous)
marché de l'art,cotations art,prix oeuvres d'art,ventes aux enchères art,artprice,artron,prix art,ventes enchères tableaux
Abstraktes Bild - Richter

lundi 15 avril 2013

Tu fais quoi? Je bricole!

En découvrant cet article, j'ai pensé qu'un rajout à mon billet sur Bécassine et son GPS pourrait le compléter. De plus, il me conforte dans l'inutilité de cette acquisition.

Dimanche 14 avril :
 
- Nettoyé mes trophées. Vraiment marre, je vais les donner au Secours Pop. Mais que vont-ils en tirer?
- Taillé mes buis.
- Contemplé ma nouvelle acquisition (je dévoile mon patrimoine (0_0). Va-t-il me rendre Zen? Me fait sourire c'est déjà pas mal. Il a été arrosé.
- Repassé linge et vêtements. Pfff!
- Ecouté R. Enthoven parler de Sartre et des Mots. Je ne m'en lasse pas. De qui? Des deux!
- Ai observé les merveilleux nuages dans le ciel.
- Ai regardé mes vitres, sales. Il va falloir y remédier. Je procrastine (mot à la mode).
- Lu quelques chapitres de En ville de Christian Oster. J'aime! comme ils disent sur FB.
- Ai remis à plus tard de répondre à mes mails.
- Butiné sur quelques blogs.
- Reçu un texto d'une amie : "tu fais quoi".
- Répondu : "je bricole. Et toi?".
- Elle : "je regarde Belmondo à la télé sur la 2".
 
Mmm! Pas question de regarder Belmondo "fêter" ses 80 ans! Je l'ai entendu deux minutes sur France Inter vendredi et j'ai vite fait de passer sur France Culture pour ne pas entendre sa voix qui n'est plus vraiment la sienne. Je l'aime trop, je veux garder en mémoire ce Belmondo, avec cette voix-là, avec cette fougue, cette exquise insolence! Peut-être vais-je en choquer quelques-uns? Peut-être ai-je été trop "entamée" par les épreuves et par l'amoindrissement d'êtres chers pour réagir ainsi? Peut-être ne suis-je pas assez forte? Peut-être ai-je trop peur de finir ainsi? Peut-être ne veux-je pas raviver de douloureux souvenirs? Aussi je laisse ce film pour les inconditionnels de Bébel.

 
 

samedi 13 avril 2013

Déconstruction, fluidité, poésie

Signature du peintre

Zao Wou-Ki
1921-2013

Zao Wou-Ki dans son atelier parisien en 2003.
Photo : François Guillot AFP

L’artiste franco-chinois (né à Pékin) a chéri la lumière. Marqué par Paul Klee et Turner, atteint d'Alzheimer, il est décédé à Nyon (Suisse) le 9 avril, à 93 ans. Naturalisé Français en 1964 grâce à son ami André Malraux.




Film complet  : 18 minutes. A voir absolument ici!

Dernier film pris avant la mort de Zao Wou-Ki par le peintre et sculpteur  Richard Texier qui nous livre un beau portrait de l'artiste


"Né en 1921 à Pékin dans une famille de lettrés, Zao Wou-ki étudie dès l’enfance la calligraphie et aborde en parallèle, à l’école des beaux-arts de Hangzhou et chez lui, en privé, l’encre et la couleur à l’huile, la perspective occidentale et la manière orientale d’organiser sa composition autour d’un vide central et constitutif. Insatisfait des possibilités que lui offre son pays en matière de recherche picturale, le jeune homme gagne la France, où il arrive en 1948 en compagnie de la femme qu’il a épousée dès la fin de l’adolescence.
« Lan-Lan était musicienne de formation, puis s'était mise à la peinture. (...) Lorsque nous nous sommes mariés, j'avais dix-sept ans, elle en avait seize. Nous étions beaucoup trop jeunes... »
[...]
Très vite, Zao Wou-Ki ressent le besoin de s'éloigner de la peinture traditionnelle ou académique, et il a envie de chercher ailleurs une autre forme d'inspiration.
[...]
 Mais en 1951, c'est la rencontre avec un autre peintre qui ouvre son horizon: Paul Klee, ce passeur des mondes, l'incite à déconstruire le sien, à s'engager dans l'abstraction.
[...] 
Car Klee aborde la peinture avec une attitude intérieure analogue à celle des peintres d'Extrême-Orient sans avoir jamais connu la Chine. C'est sa démarche que Zao Wou-Ki va suivre, et que l'on retrouve dans certains de ses tableaux notamment à Venise avec le tableau Piazza. À Anvers en 1952, et aux corridas espagnoles à la fin de la même année. Zao Wou-Ki cherche à interpréter la nature. Dans la peinture, la couleur crée un espace féérique où les fonds poncés et grattés, les dégradés de nuances rappellent les paysagistes Song. Et sur ces fonds, le peintre trace des signes, notamment le caractère-idéogramme qui se souvient du vol de la gondole à la surface de la Lagune.
[...]


 Zao Wou-Ki, Venise Piazza 1950

Zao Wou-Ki, Sienne Piazza 1951


Zao Wou-Ki, Corrida 1953



Pour surmonter l'épreuve que représente sa rupture avec sa première épouse Lan Lan au début 1957 le peintre parcourt le monde jusqu'en 1959. Il va à New York où réside son frère et il rencontre des artistes de l'école de New York qui deviendront des amis, notamment Franz Kline, Hans Hofmann, Adolph Gottlieb, William Baziotes et bien d'autres. Il apprécie la fraîcheur de cette peinture américaine spontanée. Puis avec Pierre et Colette Soulages, il visite un grand nombre de musées (San Francisco, Chicago, Washington,  D.C.), très étonné d'y trouver tant de peintures françaises. Son périple voyageur le conduit ensuite au Japon à Tokyo, puis à Hong Kong. C'est là qu'il rencontre en 1957 celle qui va devenir sa deuxième épouse : Chan May Kan, sculpteur, qui décèdera en 1972. Sur sa tombe, au cimetière du Montparnasse, une de ses œuvres.


The Chinese-French artist Zao Wou-ki met his wife, in 1958
Image from Archives Zao Wou-ki, Paris and the Sarthe Fine Arts, Hong Kong.



Photos : Wikipédia


C'est en 1971 qu'il a rencontré Françoise Marquet, alors qu'elle venait de passer le concours de conservateur des musées de la Ville de Paris. Elle a publié Zao Wou-Ki, estampes, 1938-1974 avec une préface de Roger Caillois. Zao Wou-Ki l'épouse en 1975. Françoise l'aide à rédiger ses souvenirs après son retour en Chine.

 Françoise Marquet et Zao Wou-Ki, 1977
Photo : Waintrob-Budd, New York

Pour Zao Wou-Ki, la tradition picturale chinoise s’est [...] tout naturellement décantée et métamorphosée, jusqu’à devenir cette manière inédite et unique, à la fois informelle et fondée sur la couleur, la belle couleur : [...] des lueurs qui contaminent l’entier de la toile. [...] A partir du début des années 1950, le peintre renonce totalement à la figuration pour créer des espaces contemplatifs, mi-organiques, mi-cosmiques, habités de teintes harmonieuses. Ou plutôt habités de vapeurs de couleurs, de portions de ciels, de lueurs féeriques. Il faut noter que parmi les références de l’artiste figurent en bonne place l’impressionnisme et sans doute, au-delà, les brumes de William Turner.

 

Zao Wou-Ki, huile sur toile 1968.
Acquisition Musée d’Art Moderne Paris en 1971
Crédit photo DR  


Zao Wou-Ki, Sans titre 1995



Zao Wou-Ki


Zao Wou-Ki

Ses toiles, pour la plupart de très grands formats à partir des années 1950, portent pour titre la date de leur achèvement, ou bien un titre faisant référence à un évènement connu.

D’autres peintres, comme Georges Mathieu, dans la même mouvance de l’abstraction lyrique, ont cherché et trouvé leur inspiration «ailleurs»: Mathieu comme Fabienne Verdier plus récemment ont emprunté leur gestuelle à la calligraphie extrême-orientale."


Zao Wou-ki, Sans titre 2007


Zao Wou Ki, Lorand Gaspar : "Genèse".
Livre illustré de Zao Wou-Ki, 1981, texte de Lorand Gaspar, comporte 3 gravures originales hors texte de l'artiste, celle du frontispice est signée. Tirage du livre à 100 exemplaires (XX + 80).


Zao Wou-Ki, vitrail.
En 2011 il a réalisé 14 vitraux pour le Prieuré de Saint Cosme,
où avait vécu Pierre de Ronsard.

"Sa folle échappée occidentale l'a ramené, à l'hiver de sa vie, à l'Orient, avec les encres de Chine."


"Ça c'est magnifique" dit Zao Wou-Ki en montrant ce coin de son atelier :
l'arbre et le chevalet.
(Capture d'écran du film de Richard Texier)

Source des textes :

Je n'ai fait qu'extraire ici des textes. Sa longue vie d'artiste fut si riche qu'il faut aller plus avant rechercher des informations, des documents sur cet homme et ses origines. Sa peinture, ses estampes, ses encres  m'ont toujours éblouie.

Rajout du 22 décembre 2015 : Exposition Hommage à Zao Wou-ki

«Zao Wou-Ki», Fondation Pierre Gianadda, Martigny, du 4 décembre 2015 au 12 juin 2016. Tous les jours 10h-18h.