mardi 10 novembre 2009

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Je termine La vérité sur Marie. C'est fracassant de beauté. Les passages sur Zahir (l'étalon rebelle et impérial) sont stupéfiants de réalisme et de poésie.

Je pense à un mon ami D.M., fou de chevaux qui m'écrivit un jour à propos d'un cheval :

"Je lui rends visite de temps à autre en son haras de Gruchy près de Bayeux. Il raffole tout autant des pommes que des nuages et des oiseaux qu'il regarde au loin inlassablement.
Ourasi fut ce trotteur au palmarès éblouissant. Il remporta dans les années 80 quatre prix d'Amérique (le championnat du monde des trotteurs attelé, à Vincennes). Ce record n'a jamais été battu ni égalé. On l'appelait le roi fainéant, parce qu'il courait toujours battu, dernier du peloton et attendait l'ultime ligne droite pour surclasser ses rivaux. C'est, dit-on, un cheval de légende.
Aujourd'hui c'est un cheval toujours aussi paisible, il a vingt-huit ans. Cette masse de cinq cents kilos est d'une tendresse étonnante. J'aime quand il pose sa tête sur ma poitrine, j'aime sentir son souffle chaud, j'aime lui murmurer à l'oreille... Quand je pénètre dans son enclos, il pointe ses oreilles et vient vers moi de son trot nonchalant. C'est un bonheur rare que de connaître la confiance et la tendresse d'un tel animal..."


Et J.P. Toussaint parlant de Zahir (le contexte n'est pas le même!) :

"Alors lentement, apparut la croupe du pur-sang - sa croupe noire, luisante, rebondie -, à reculons, les sabots arrière cherchant leurs appuis sur le pont, battant bruyamment sur le métal et trépignant sur place, très nerveux, faisant un écart sur le côté, et repartant en avant. (...) C'était cinq cents kilos de nervosité, d'irritabilité et de fureur qui venait d'apparaître dans la nuit. (...) Le chef d'escale de la Lufthansa, son talkie-walkie à la main, s'était approché du van et personne ne bougeait plus, ni le cheval, arrêté à mi-pont - immobile, furieux, impérial - ni les spectateurs, fascinés par la force brute de cet étalon immobile, ses muscles, longs et puissants, saillants, tendus, qui contrastaient avec le tracé gracieux des pattes, la finesse des paturons, minces, étroits, délicats comme des poignets de femme".

Je veux TOUT lire de Jean-Philippe Toussaint. Je viens d'acheter La salle de bain et La télévision, le reste est en commande.
Je suis sous l'emprise de son écriture.
Je viens d'entendre Alain Finkielkraut sur France Culture  :
"La littérature c'est l'accès à toutes les nuances de l'amour, à toutes les nuances du désir".

Que de Je... Ouille, mon blog le bien nommé.