dimanche 4 juillet 2010

Imagination, rêverie

Ce fut une semaine passionnante dans les NCC consacrés à Gaston Bachelard, le dormeur éveillé.
Il fut beaucoup question de l'imagination/de l'imaginaire, du rêve/de la rêverie.
Pour ma part je m'adonne et m'abandonne volontiers (et volontairement) à l'imagination et à la rêverie et ce sujet ne pouvait que m'intéresser.
J'ai pris ces quelques notes :

Paradoxalement, l'imagination doit être rigoureuse, sans quoi elle n'est pas créatrice. La partie de l'ouvert de l'imagination, la partie évasion, c'est l'imaginaire.
L'imagination pour Bachelard est une co-naissance, à la fois un congé et une naissance,
- un congé qui est celui de l'esprit qui se libère des lois de perception de l'emprise du réel. Percevoir et imaginer sont aussi antithétiques que présence et absence. Imaginer c'est s'élancer vers une vie nouvelle.
- une naissance qui est la naissance d'un univers structuré, riche, organisé.
L'esprit, le coeur, l'âme et la raison chapeautent tout ça.
Ensuite il parle de la rêverie volontaire (oxymore) ou d'un laisser aller volontaire, "le paradoxe d'une volonté de ne pas en avoir."
Il y a le rêve de la nuit qui est proprement involontaire mais il y a la rêverie de la journée qui est ce moment de vacance de la raison, alors qu'on ne dort pas, qu'on ne désire pas forcément dormir mais qu'on s'abstrait.
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"Pendant ce mois où je ressassais comme une mélodie sans pouvoir m'en rassasier ces images de Florence, de Venise et de Pise, desquelles le désir qu'elles excitaient en moi gardait des choses d'aussi profondément individuelles que si ça avait été un amour, un amour pour une personne, je ne cessais de croire qu'elles correspondaient à une réalité indépendante de moi, et elles me firent connaître une aussi belle espérance que pouvait en nourrir le chrétien des premiers âges à la veille d'entrer dans le paradis.
Aussi, sans que je me souciasse de la contradiction qu'il y avait à vouloir regarder et toucher avec les organes des sens, ce qui était élaboré par la rêverie et non perçu par eux, et d'autant plus tentant pour eux, plus différent de ce qu'ils connaissaient, c'est ce qui me rappelait la réalité de ces images qui enflammait le plus mon désir parce que c'était comme une promesse qu'il serait contenté. Et bien que mon exaltation eut pour motif un désir de jouissances artistiques, les guides l'entretenaient encore plus que les livres d'esthétique et, plus que les guides, l'indicateur des chemins de fer."


Marcel Proust, A la recherche du temps perdu. Extrait lu au cours de l'émission : L'imagination, Gaston Bachelard, le dormeur éveillé.