J’ai suivi cette semaine les conférences de Michel Onfray rediffusées sur France Culture pendant l’été. Difficile aujourd'hui de parler de Michel Onfray et de Freud sans faire référence à la polémique sur son dernier ouvrage. Lire aussi ce billet d'un blogueur sur le sujet.
Pas tristes du tout ces quelques notes de Sigmund Freud, issues d'une des conférences.
Il nous dit :
« Une flamme c’est un phallus et il y a une homologie entre le jet d’urine sur le feu et l’acte sexuel avec un homme ».
« La miction c’est la jouissance de la puissance masculine, sans la compétition homosexuelle. Se retenir d’arroser le feu c’est la maîtriser, la maîtriser c’est la puissance » (sic).
Il dit encore :
Pourquoi est-on mélomane ? (Je vous le donne en mille ;o))
« Il y a des mélomanes parce qu’il y a des pétomanes ! »
C’est une correspondance du 26 juin 1931 avec Stefan Zweig (Michel Onfray a rectifié le lendemain qu’il s’agissait bien de Stefan et non d'Arnold Zweig comme il l’avait indiqué. Les deux eurent un lien d'amitié avec Sigmund Freud) qui nous le dit.
« J’ai remarqué en analysant plusieurs musiciens qu’ils avaient un intérêt particulier – et depuis l’enfance – pour les bruits que l’on produit avec les intestins. Est-ce une forte composante anale dans cette passion pour le monde sonore ?»
On sait qu’il a analysé Gustav Mahler en faisant une balade dans un jardin, deux ou trois heures dans une après-midi, et que Mahler s’en est trouvé probablement « allégé ».
Il y a une relation entre le fait d’aimer la musique et d’avoir été pétomane un jour. « Pétomane un jour, pétomane toujours » dixit M. Onfray.
La suite ou le début de cette conférence à écouter ici.
Interpellée par le sujet (rires) j’ai trouvé le texte ci-dessous - que l’on peut lire entièrement ici - très intéressant :
Du pétomane au mélomane
De nombreux auteurs ont souligné l'importance de l'analité dans la genèse pulsionnelle de la musique, qui prendrait son origine dans le plaisir infantile du pet, comme Ferenczi (1922) a cru le déceler chez des musiciens ou mélomanes. Milner (1969) rapporte les démêlés de Suzanne, et Lecourt (1987) ceux de David, avec le pet. Après quoi, cet enfant autiste pourra se mêler de musique. Cependant cette connotation, anale d'une part, musicale d'autre part, du pet n'implique pas, en bonne logique, de lien direct, et surtout causal, entre musique et libido anale.
En fait, l'intérêt pour la musique pourrait avoir de bien étranges et plus anciennes racines. Nous trouvons dans l'expérience ante-natale de quoi nourrir notre réflexion à ce sujet : le foetus est l'auditeur obligé du concert sans cesse renouvelé des rythmes maternels, bruits respiratoires, cardiaques, mouvements de la marche ; il entend aussi une mélodie : celle des bruits intestinaux de sa mère (suintements, claquements, grincements, écoulements, etc.) qui évoquent pour nous, de toutes les manières, les sons du pet. Le caractère régressif de ces sons les rend très réactogènes, non seulement chez les tout-petits auxquels nous avons fait entendre des enregistrements intestinaux, mais aussi chez les adultes, tels ces apprentis musicothérapeutes de L'A.M.Bx qui en furent étonnés. Les anciens soulignaient cette proximité qui se redouble de celle de la parole en la personne d'Hermès (Mercure), tout à la fois dieu de la musique, des vents (!), de la parole et... de l'argent ! Aux bruissements intestinaux du plaisir, après les rugissements et les couinements de la détente en train d'advenir, répondent, chez le foetus qui les entend, l'inondation chimique qui l'excite et lui donne peut-être quelque genre d'orgasme avant la lettre ! Il retrouvera tout cela dans les ineffables gémissements ou les harmonies sublimes de la musique. Avec la demi-jouissance des sens qu'elle engendre à n'être pas compagne de réalités plus somatiques comme dans le " paradis " matriciel.
Le très intéressant film de Horatiu Malaele (Roumanie, 2008) "Au diable Staline, Vive les mariés" nous présente au cours du repas de Noces un des protagonistes incapable de contenir ses bruits intestinaux alors que toute la noce - y compris l'orchestre - s'impose la contrainte du silence pour éviter d'être repérée par les soviétiques. L'effet est saisissant et son comique réside pour beaucoup dans cette substitution inattendue à la musique interdite de cette musique inconvenante !
Je ne suis pas musicienne mais je suis… euh… mélomane. Non mais !
C'était : mon bon vent musical de l'été.