samedi 26 juin 2010

Oublier quoi

"Parfois je me demande pourquoi, de toute ma vie passée, il ne me reste que le chien. Je pense au chien, je pense à cette relation qui ne fut jamais explicite, toujours contradictoire, une erreur, une joie, un tourment.
[...]
Avec mon chien j'avais repris mes promenades et retrouvé mon ancien amour pour les arbres. Pour le chien, un endroit où lever la patte : pour son maître d'alors un plaisir des yeux. J'ai toujours voulu entourer les arbres de mes bras, je passais la main sur l'écorce rugueuse, je me mettais tout près de leur tronc noueux, je voulais me les approprier en entier, y compris les racines enfouies dans le sol, c'était plus qu'un désir d'intimité."


Quelques lignes des premières pages du livre de Paul Nizon que je viens de commencer, Chien, Confession à midi.

Chien est le livre de la plus radicale des ruptures, l'histoire d'un homme qui a rompu les amarres, quitté sa famille, dénoué tout lien amoureux, répudié les valeurs du travail et de l'appartenance civique. [...] Exégète de la dissidence, il observe l'absurdité frénétique de la ville, s'emplit les yeux et les oreilles de sensations : bruissement urbain, silhouettes qui fourmillent, merveilleux spectacle de l'effervescence quotidienne. Et il se souvient. De ses chiens. De son chien tant aimé. Qu'il a abandonné un beau jour, lui aussi. Pour en finir. Pour ne plus être tenu en laisse par quoi que ce soit.
Chien est également le livre le plus radical de Paul Nizon : un contre-portrait de l'artiste par le personnage, une réplique à l'autofiction comme à ceux qui veulent faire entrer tout et tout le monde dans leurs histoires.
Chien est un roman anti-romanesque et superbement asocial, un éloge émouvant de l'absolue liberté, le capriccio d'une solitude intense, délibérée, conduite par la nécessité extrême de la littérature.


4ème de couverture.

Samedi 26 juin

8 h 45. J'ai dû dormir cinq heures cette nuit. Il fait chaud dans cet appartement et faire des courants d'air fenêtres ouvertes cela signifie entendre les voitures. Mes cernes s'accentuent en ce moment.
9 h 30. J'allume mon ordi...
10 h 30. Je file chez Emmaüs.
Mon téléphone sonne toutes les quart d'heures depuis 9 heures. Y a de l'abus! Je ne décroche pas lorsque le nom ne s'affiche pas. Je sais que ce sont des démarcheurs et ça m'agace. C'est tous les jours qu'ils appellent.

15 h 30. Je viens de lire une petite heure, à l'abri de la chaleur. C'est bien l'été cette fois. Je voudrai que la lumière qui envahit ma pièce me pénètre, m'éblouisse, (m'anéantisse?) me fasse oublier... quoi? J'ai tout pour être heureuse, c'est ce que je me disais ce matin en revenant de chez Emmaüs où j'ai déposé un lampadaire. Le pied s'était dévissé et je n'ai pas réussi à le revisser, il devait y avoir un truc pour que ça tienne, je n'ai pas trouvé; un bricoleur l'aurait remis sur pied en quelques minutes, c'est sûr. Alors je l'ai donné à Emmaüs, en trois morceaux. De toute façon j'avais envie d'en trouver un plus design. Futile, tout est futile... En rentrant dans cet appartement je voulais le vendre pour une bouchée de pain, je l'avais pris en photo.


En lisant ce passage de "l'arbre" dans Chien, je me souvenais aussi d'aimer lors de promenades m'attarder près des arbres, de caresser leur écorce noueuse, de vouloir les enserrer.

Trés réussi mon coup de gomme magique. J'arrive encore à me faire rire, rien n'est perdu.
J'ai retrouvé cette photo qu'un ami avait prise lors d'un séjour en Corse, ce pays qu'il m'avait fait découvrir en moto il y a dix ans, déjà. Il me voyait essayer d'entourer l'arbre avec mes petits bras et il m'a dit : retourne-toi! il a fait cette photo.

Oui, oublier quoi? Moi seule le sais.