vendredi 1 octobre 2010
Du goudron et des plumes
Mon premier spectacle de la saison, au théâtre, hier soir. J’ai pris quelques vidéos mais elles ne représentent absolument pas la beauté, la poésie, la magie des scènes de visu et à vrai dire, je n’ai pas voulu filmer quand cette magie était à son comble car je voulais profiter pleinement de ce que je voyais au lieu de tenir mon appareil de photo et rater ce qui méritait la plus grande attention et mon émerveillement. Donc pas de vidéos!
En quelques mots Du Goudron et des plumes est une création artistique de Mathurin Bolze avec des comédiens (de véritables acrobates de la danse) qui pourraient être issus du cirque (et qui le sont peut-être) tant ils excellent dans la voltige en défiant les lois de la gravité. On se demande par quel miracle ils tiennent parfois quelques secondes entre ciel et terre.
Le décor est une sorte de radeau suspendu (un vaisseau mobile) qui oscille comme un pendule, se balance au-dessus d’une mer invisible, radeau qui devient plafond lorsqu’il s’élève. C’est autour de ce décor que s’articule la dramaturgie du spectacle, dans ce mouvement de balancement activé par les cinq comédiens qui forment l’équipage. Sont-ils sur une île, sur une autre planète dont ils subissent la révolution ? Ils sont embarqués c’est sûr dans un périple fait de rêveries, de souvenirs, de paysages chaotiques et renversants (leur virtuosité à se mouvoir est époustouflante). Les trappes s’ouvrent, se ferment, les passagers virevoltent vertigineusement autour des mâts, à l‘envers à l’endroit, en quête d’un impossible équilibre et la bande-son qui accompagne devient tonitruante dans un final tempétueux ; (j’étais un peu trop près de la scène et des enceintes pour mes pauvres oreilles déjà bien abîmées).
J’ai regardé ce spectacle dans le plus grand émerveillement, avec des yeux d’enfant ébloui et je ne suis pas d’accord avec la critique du Point en ce qui concerne le dernier quart d’heure qui serait redondant; il le fallait, c’était l’apocalypse et, pour ma part, j’avais plutôt envie à ce moment -là de monter sur la scène et d’aller avec l’équipage fracasser ce qui restait de cette épopée, dans une sorte de transe collective enragée.
"Cette tendance jusqu’au-boutiste à trouver toutes les combinaisons d’un objet pour en faire jaillir de multiples scénarios fait du spectacle de Mathurin Bolze une mine d’idées". Le Monde
"Au tout début de la création de Du goudron et des plumes, Mathurin Bolze revendiquait comme source d’inspiration le roman de John Steinbeck, Des souris et des hommes. Au final, il n’en reste aucune trame narrative mais de nombreux détails. Un air d’harmonica, des costumes années 1920 ou encore une femme en talons aiguilles par qui le drame arrive. Ces personnages sont les sans-terre de la crise de 1929. Ils sont aussi ceux de la crise de 2010, les survivants du tremblement de terre en Haïti ou les exilés africains échoués sur les rives de la Méditerranée. L’esquif imaginé par Mathurin Bolze est une métaphore vertigineuse des déracinés du monde entier." Evene.
Ma saison théâtrale a très bien commencée. Si ce spectacle passe dans votre région, allez-y, vous ressortirez avec des ailes !