jeudi 10 septembre 2009

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Je me souviens de son regard intense quand elle m'a dit : promets-moi de m'aider à mourir. Promets-moi de ne jamais me laisser vivre indignement si je ne suis plus qu'un corps sans chair, qu'un regard dans le vide, qu'un cerveau déboussolé.
Je l'ai embrassé en riant, je lui ai dit de se taire.
Elle ne riait pas, elle a répété : promets-moi ma chérie.
Je l'ai serré dans mes bras et je lui ai promis.

Nous rentrions du Village Suisse, elle était venue m'aider à porter le lourd tapis d'Iran que je venais d'acheter; une petite folie. Le matin nous étions allées voir sa soeur, ma mère, en fin de vie, atteinte de la maladie d'Alzheimer. En repartant, nous étions toutes les deux atteintes dans nos coeurs, nous nous sentions impuissantes. Une révolte sourdait en nous.

Je me souviens du jour où nous avons pris le train toutes les deux, en catastrophe. Nous allions à l'enterrement de mon père. Nous sommes allées prendre un café au wagon-bar. Voyant mon désarroi elle m'a raconté une histoire, et j'ai éclaté de rire. J'avais honte. Elle m'a dit : mais non ma chérie, tu as encore le droit de rire.

Bientôt je vais te libérer, je te promets.