samedi 25 décembre 2010

Un Noël zen

24 décembre 2010.

En guise d’apéritif, j’ai lu quelques pages de La pensée chinoise :

" […] le début de l’année chinoise est, par principe, variable : c’est en fixant les heures, jours et mois initiaux que les différentes dynasties déterminent leurs insignes et leur calendrier de façon à singulariser le Temps de leur domination. Fait remarquable : le début de l’année n’a jamais oscillé qu’entre les divers mois de la saison froide. La fête hivernale n’a pas été, dès l’origine, une fête solsticielle : son nom peut vouloir dire : fête de l’allongement des nuits, - et il est certain qu’elle présente tous les caractères d’une fête des récoltes. Sa durée, d’abord fort longue, était en fait déterminée par des termes réels, ceux du gel et du dégel. Elle s’étendait, avec ses cérémonies initiales et terminales, sur toutes les périodes de l’hivernage, si bien que de nombreux épisodes rituels ont pu s’en détacher : attribués aux huitième et deuxième mois, ils ont marqués les deux bouts d’un axe équinoxial de l’année. […] L’Espace par quadrants, un ordre liturgique, fondé sur la division de l’année en quatre saisons, servit à rythmer le Temps. Mais on doit noter qu’une des extrémités de la croisée est restée à peu près vide de valeur religieuse : elle correspond simplement aux vacances d’été, simple temps de repos et d’abstention. Les vacances d’hiver ont une autre importance. Même réduites à une période de six ou de douze jours, elles semblent valoir autant que l’année entière."


Marcel Granet, in La pensée chinoise, éditions Albin Michel.

En ce soir de Noël, tandis que je passais mon après-midi à lire des Correspondances, Journaux intimes et autres Carnets d’écrivains, - pour vérifier quel était leur état d'esprit en ce mois de décembre de leur époque - et, en véritable païenne, alors que j’entendais sonner les cloches de la messe de minuit, je ne chantais point le Minuit chrétien ni Il est né le divin enfant, non, à cet instant là je regardais un film de Wong Kar Wai (encore lui) : Nos années sauvages.
"Romantique et mélancolique, tendre et poétique, déchirant et évocateur, ce film est le portrait de l’innocence perdue de l’adolescence." "Dans les années 1960 à Hong Kong, Yuddy, élevé à la diable par sa mère adoptive, indolent et charmeur, se laisse bercer par la vie, passant de bras en bras, seulement alarmé quand on lui propose le mariage. Narcissique, obsédé par le besoin qu'il éprouve de découvrir ses origines, Yuddy quitte amis, maîtresses et mère pour partir aux Philippines, à la recherche de son passé." Wong Kar Wai pensait faire une suite à ce film mais n'ayant pas eu le succès escompté ce fut In the mood for love qui remplaça la suite. J'ai pour ma part trouvé ce film beau et tant sur le plan des images que du scénario; je l'ai vu en V.O. mais c'est un film plus visuel que verbal. "Le film a remporté 5 prix lors des Hong Kong Film Awards de 1990 (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur pour Leslie Cheung, meilleure direction et meilleure photo)".

Sans doute est-ce parce que je suis en "immersion" sur la Chine avec ma lecture de La pensée chinoise et ce chapitre sur le Temps et l’Espace que j’ai été frappée par le rythme de ce film où le temps est parfois suspendu ou pointé précisément dans sa durée. C’est un film sur le souvenir, tout finit par s’éloigner dans les souvenirs sans jamais pouvoir être oubliés (comme dans cette scène que j’ai filmée maladroitement où cette femme se confie à un policier anonyme, 3ème vidéo ; elle lui parle de cette minute, première vidéo). La bande annonce, magnifique, aurait pu suffire mais j'ai souhaité insérer mes vidéos - faut oser après la bande annonce car elles sont vraiment de mauvaise qualité - pour argumenter ce sujet du Temps et de la durée...





Ce fut une belle "messe de minuit" très païenne.

Aujourd’hui, 25 décembre, jour de Noël, à l’heure où les repas de famille devaient s’éterniser autour de la dinde et de la bûche, je passais solitaire un Noël divin : 3°, un soleil radieux. Un temps à m'adonner à mon sport favori, ce que je fis, en oubliant le Temps mais pas l'Espace. Certains greens étaient encore gelés malgré le soleil.



Et pourtant près de la piscine je me demandais si j'étais à Marrakech ou dans le Finistère!



Pas un pékin dehors, les bretons préfèrent la pluie au froid (ils sont fous) l'espace m'appartenait. Un Noël zen!