Une semaine dans les NCC sur l’Amour. Évidemment, je jubile et pourtant j’enfonce un peu plus le clou dans mon cœur ; comment peut-on vivre sans aimer ? Sans ce souffle de vie qui nous porte, nous transporte, mieux vaut mourir tout de suite.
Mardi : Allan Bloom lecteur de Rousseau.
L’émission commence par un extrait de La Nouvelle Héloïse : comment l’amour peut gouverner une âme jusqu’à son dernier souffle.
L’intrigue :
« La Nouvelle Héloïse relate la passion amoureuse entre Julie d’Étanges, une jeune noble, et son précepteur, Saint-Preux, un homme d’origine humble. Après avoir tenté de s’en défendre, ce dernier va tomber sous le charme de sa jeune élève. Saint-Preux et Julie vont alors s’aimer dans le décor romantique du Lac Léman, mais leur différence de classe sociale les force à garder leur relation secrète. En raison des conventions sociales qui empêchent cet amour de s’exprimer au grand jour, Saint-Preux quitte la Suisse pour Paris et Londres d’où il va écrire à Julie. Ces deux personnages vont alors échanger de nombreuses lettres et billets amoureux délibératifs, cherchant une réponse au dilemme que leur pose leur amour et à la situation catastrophique qu’elle engendre… ».
C’est un roman qui est d’autant plus vivant, vivace (dixit R. Enthoven) qu’il ne débouche jamais..., ou plus exactement, qu’ils (les amants) ne finissent pas ensembles. C’est un amour qui se vit malgré tout sur le mode du regret de n’être pas vécu, ou de la sublimité d’un amour idéal qu’on ne vit pas.
Réplique de Claude Habib son invitée : Mais il est quand même vécu car il y a eu une nuit d’amour stupéfiante. La sexualité est au centre de l’amour, c’est une épreuve nécessaire de la passion, il n’y a pas de passion sans cet acte sexuel par lequel il [l’amour] culmine.
Plus loin dans l’émission, ce bel extrait de l’épilogue dans L’Amour et l’Amitié de Allan Bloom (philosophe américain), traduit par Pierre Manent.
«L’amour est besoin, désir, conscience de notre incomplétude. C’est une passion de l’âme qui engage le corps et vise à l’union des deux, aussi difficile que soit celle-ci.
L’amour est un oubli de soi qui rend l’homme conscient de soi ; une déraison qui est la condition pour qu’il raisonne sur lui-même.
La peine qu’il produit est liée au plus extatique des plaisirs et il fournit les expériences primordiales de la douleur, de la vie, de la beauté. Il contient de puissants éléments d’illusions, il est peut-être de part en part illusions, mais ses effets ne sont pas illusoires.
Celui qui aime peut accomplir les actions les plus prodigieuses de la manière la plus spontanée, sans être guidé par un principe ni commandé par le devoir.
Celui qui aime sait la valeur de la beauté, il sait aussi qu’il ne peut vivre bien – peut-être même qu’il ne peut vivre du tout – s’il reste seul. Il sait qu’il ne se suffit pas à lui-même.
L’amant est l’expression la plus claire de l’imperfection naturelle de l’homme et de sa quête de la perfection.»
L’amour chez Rousseau est imaginaire et fondamental.
La solitude est d’abord une séparation ; quand on est seul on est déchiré.
Rousseau dit dans l’Emile qu’il y a bien une perception de l’âme de l’autre dans le choc amoureux. Ce qui se produit entre deux êtres c’est bien une vision l’un de l’autre, c’est une vision qui ne s’accorde à rien de ce que la société peut voir.
« On a fait l’amour aveugle, c’est qu’il a de meilleurs yeux que nous et qu’il voit des rapports que nous ne pouvons apercevoir. »
Dans cet instant de la compréhension érotique de l’autre vous voyez l’essentiel de l’homme (dixit Claude Habib).
On en est qu’à la moitié de l’émission, on peut l’écouter entièrement ici.