Jeudi 2 juin 2011. Ascension.
Réveil à 7 heures après une nuit d’un sommeil de plomb ! Je descends tout de suite prendre mon petit déj. ! Personne à cette heure dans la salle, il est trop tôt pour un jour férié...
De retour dans ma chambre un dernier regard rapide sur le lac qui s’est calmé, sur Lausanne… la vue est bien dégagée. Me revient une fois encore un texte lu à la médiathèque, sur la rive d’Evian vue de la Suisse :
« C’est cette autre rive du lac, et elle est juste en face de nous, mais on ne peut dire qu’elle soit fixe. Cette rive est une rive mobile, et tantôt elle est toute proche, tantôt éloignée de nous. C’est une rive mal attachée et à une corde trop longue, de sorte qu’elle se déplace sans cesse, venant en avant, allant en arrière, par des avancements, des retirements continuels, - parce qu’elle s’ennuie peut-être, alors elle se met en route pour venir nous faire visite, puis tout à coup la fierté ou la timidité la retient en chemin.
Elle montre des fois jusqu’à ses toits et aux façades de ses maisons, ses moindres coins de prés, ses plus petits champs, ses routes, ses sentiers, ses châtaigniers comme des boules, c’est quand elle est poussée vers nous ; - certaines autres fois elle n’apparaît plus que toute refusée, se repliant à elle-même et dans le fond de la distance dont elle prend les vêtements, se voilant d’un voile bleu.
C’est selon son humeur, c’est selon le temps qu’il va faire (quand elle s’éloigne, c’est le beau temps ; quand elle se rapproche, c’est le mauvais) ; - c’est selon son humeur, selon qu’elle est triste ou non, qu’elle est sauvage ce jour-là ou qu’elle se sente au contraire, comme il arrive, certaines autres fois, le cœur apprivoisé… »
Extrait de Fragment du lac (rebaptisé La Traversée)
C.F. Ramuz, in Salutation paysanne, éditions Grasset, 1929.
Je quitte l’hôtel à 8 h 20, je me paume un peu en sortant d’Evian pour retrouver l’autoroute, je compte m’arrêter vers Paris pour passer la nuit mais il est 13 h 15 lorsque j’approche de la capitale, je trouve qu’il est trop tôt pour m’arrêter, je poursuis ma route, Chartres, Le Mans, allez je vais jusqu’à Rennes. Je suis crevée, je ne vois plus clair, il est 19 h 15. J’appelle mon frère, c’est ma belle-sœur qui décroche ; je leur dis que je suis sur la route et à une heure et demie de chez eux ; ils m’attendront… je suis folle d’avoir fait tant de kilomètres d’une seule traite ; 1050 kilomètres, seule, alors que je m’étais imposée de n’en faire que 800 ; je sais que ce n’est pas sérieux, je ne le ferai plus. J’arrive épuisée chez eux à 20 h 50 !!!! 12 heures que je suis sur la route. J’ai le vertige mais pas question de m’apitoyer en voyant mon frère, le visage creusé, d’une autre fatigue que la mienne. J’ai envie de le prendre dans mes bras, mais dans la famille on n’aime pas les élans trop expansifs, on a sa pudeur. Je l’embrasse, je le regarde dans les yeux, il a l’air content de me voir. Ma belle-sœur m’a préparé un encas très rafraîchissant, ils ont déjà dîné, c’est vrai, il est tard.
Cette étape n’était prévue que le lendemain, rapidement, le temps de prendre un café. Je leur offre de la confiture de cassis artisanale achetée à Chamonix et à ma belle-sœur, qui est une grande lectrice de romans, j’offre (ce n'était pas prévu) les deux livres achetés pour l’amie de Lausanne que je n’ai pu rencontrer. Tout est bien qui finit bien. Je garderai pour moi le livre que j’avais acheté pour mon ami Suisse, déniché chez un bouquiniste, édition épuisée, l’ouvrage est beau avec des photos sur l’art du thé en Chine. Je n'ai pas pu le voir, il eut fallu que je reste une journée de plus et l'hôtel était complet. Je n’offre toujours que des livres que j’aimerais garder mais là c’est avec nostalgie que je le feuilletterai. J'inventerai une jolie histoire en me disant que c'est lui qui me l'a offert.
Je passe la matinée avec eux. Nous regardons mes photos sur l’ordinateur, mon frère connaît Chamonix, il en garde un souvenir merveilleux, ravivé par mes photos.
Je les quitte après le déjeuner.
Plus que une heure et quart de route. Youpi !!!!
Z’étaient chouettes mes vacances !
Fin.