face aux jardins de la cathédrale Notre Dame
En écoutant la suite des émissions sur la nostalgie et celle de ce matin consacrée à L'Irréversible et la nostalgie de Vladimir Jankélévitch j'ai une fois de plus fouillé dans sa biographie et je suis tombée sur cet article publié par Jérôme Garcin dans L'Express en 1995! dont j'extrais ces lignes :
«Je ne suis pas fait du tout pour la philosophie des salons; je sais que je suis trop violent, pointu, âpre, paradoxal.»
Il ne comprenait pas qu'on paressât ou se contentât d'une existence confortable. Il jugeait, par exemple, dérisoires, chez son frère, le goût des beaux meubles et l'aspiration à l'harmonie familiale. Il vitupérait les parvenus endimanchés, ces «macaques». Il pensait qu'il fallait tout sacrifier à son travail. Il affichait une tempérance de cénobite et, parfois, un moralisme de calviniste: en 1929, répudiant l'idée de rachat et appelant à «la purification intime de la conscience», ce juif par sa mère se fût volontiers converti au protestantisme. A l'âge où l'on a plutôt un gros appétit et beaucoup d'occasions d'être infidèle à soi-même, il distinguait les exigences intérieures, qui sont souveraines, de «la vie extérieure», qui, selon lui, pouvait attendre.[...]
En 137 missives, toute l'existence de Jankélévitch, brisée en deux par la dernière guerre, est ici rassemblée, depuis sa jeunesse prometteuse et un peu fanfaronne jusqu'à sa vieillesse assombrie par le sentiment qu'il éprouvait de n'avoir ni lecteurs ni critiques, d'être mal compris, négligé, démodé. On n'imaginait d'ailleurs pas si solitaire, si amer, le titulaire de la chaire de philosophie morale de la Sorbonne, l'admirable styliste de «L'Irréversible et la nostalgie».
[...]
«Il est vraiment temps de quitter ce monde. Place aux ordinateurs et au dieu Business», confie alors Jankélévitch à son vieil ami en janvier 1975, avant de se pencher sur le piano à queue, son ultime refuge, et de laisser parler la musique, ce prélude à l'éternité dont seuls les grands interprètes comprennent la langue des morts."
Une vie en toutes lettres, par Vladimir Jankélévitch. Préface et notes de Françoise Schwab. Liana Lévi, 472 p.
«Je ne suis pas fait du tout pour la philosophie des salons; je sais que je suis trop violent, pointu, âpre, paradoxal.»
Il ne comprenait pas qu'on paressât ou se contentât d'une existence confortable. Il jugeait, par exemple, dérisoires, chez son frère, le goût des beaux meubles et l'aspiration à l'harmonie familiale. Il vitupérait les parvenus endimanchés, ces «macaques». Il pensait qu'il fallait tout sacrifier à son travail. Il affichait une tempérance de cénobite et, parfois, un moralisme de calviniste: en 1929, répudiant l'idée de rachat et appelant à «la purification intime de la conscience», ce juif par sa mère se fût volontiers converti au protestantisme. A l'âge où l'on a plutôt un gros appétit et beaucoup d'occasions d'être infidèle à soi-même, il distinguait les exigences intérieures, qui sont souveraines, de «la vie extérieure», qui, selon lui, pouvait attendre.[...]
En 137 missives, toute l'existence de Jankélévitch, brisée en deux par la dernière guerre, est ici rassemblée, depuis sa jeunesse prometteuse et un peu fanfaronne jusqu'à sa vieillesse assombrie par le sentiment qu'il éprouvait de n'avoir ni lecteurs ni critiques, d'être mal compris, négligé, démodé. On n'imaginait d'ailleurs pas si solitaire, si amer, le titulaire de la chaire de philosophie morale de la Sorbonne, l'admirable styliste de «L'Irréversible et la nostalgie».
[...]
«Il est vraiment temps de quitter ce monde. Place aux ordinateurs et au dieu Business», confie alors Jankélévitch à son vieil ami en janvier 1975, avant de se pencher sur le piano à queue, son ultime refuge, et de laisser parler la musique, ce prélude à l'éternité dont seuls les grands interprètes comprennent la langue des morts."
Une vie en toutes lettres, par Vladimir Jankélévitch. Préface et notes de Françoise Schwab. Liana Lévi, 472 p.