Il y a deux semaines j’étais à Brest pour mon pèlerinage annuel.
Au cimetière sans prier, puis prières en dégustant des moules, comme chaque année, et en contemplant à travers les vitres le port de plaisance, sous la pluie. Cependant l’année dernière il faisait beau, si beau qu’une vieille femme voulut se baigner et s’enfonça dans la vase. Mais les éclaircies sont promptes à faire la nique au ciel gris et je pus prendre mon café sur la terrasse. Le ciel breton c'est un magicien qui fait disparaître les nuages dans son chapeau, il en sort un soleil en l'espace de quelques minutes...
D’habitude je reste là, durant une petite heure, à me balader sur le port de plaisance. Cette fois je me décidai à retourner sur les lieux de mon enfance. Pas de chance, la rue où j’habitais était en travaux ; déviation. Je dus donc me garer plus loin, en face de ce mur au graffiti étonnant. Je le trouvais beau, le travail était minutieux.
Plus tard je fis une recherche sur Internet pour trouver l’auteur (on trouve vraiment tout sur la Toile) et je dénichai cette photo du « graffiteur » en plein travail.
J’arrivai dans « ma » rue, en l’empruntant par le haut, les travaux s’arrêtaient juste devant la maison de mon enfance.
En voyant tous ces fils électriques et téléphoniques traverser le ciel et la maison je me dis : ce serait bien que les travaux soient des travaux d’enfouissement de tous ces fils peu esthétiques. La maison a été repeinte. Le bruit des pelleteuses et marteaux piqueurs agressent mes oreilles mais n'occultent pas mes souvenirs : au rez-de-chaussée (c'était en fait le sous-sol avant) cette devanture avec des hublots est étrange, je ne sais pas si c'est toujours un cabinet de kinésithérapie, c'est ce qui existait après que mes parents aient vendu l'épicerie à un kiné. Je revois la devanture de l'époque où nous étions avec ma grande soeur, maman et ma tante; la photo ci-dessous doit dater de 1955 (?), ce devait être l'été puisque les volets étaient clos.
Au premier étage, la fenêtre de droite : la cuisine, celle de gauche : la salle-à-manger, le salon en prolongement donnant sur le jardin à l'arrière de la maison.
Au deuxième, ma chambre à droite et celle de ma soeur aînée, à gauche la chambre de mes parents. Derrière donnant sur le jardin, celle de mon grand-père. Oui, à l'époque les enfants gardaient leurs parents avec eux, même si parfois c'était un calvaire.
Au dernier étage : la chambre de mon frère à droite, celle de la "bonne" à gauche. C'est ainsi qu'on appelait une femme de ménage logée et nourrie, à cette époque-là. A l'arrière toujours sur le jardin : le grenier, notre caverne d'Ali Baba. Nous y jouions à la dînette ou au Meccano avec mon frère. Nous y invitions nos petits copains et copines.
J'aimerais pouvoir pousser la porte pour voir le jardin. Le saule pleureur que tu avais planté papa et qui te désespérait parce qu'il ne poussait pas assez vite, semble avoir pris de l'envergure, j'en aperçois le sommet.
Je continue ma promenade jusqu'au "château"; c'est le nom que nous donnions à cette bâtisse où je fus invitée bien souvent à des parties de cache-cache. Le petit garçon du lieu était mon petit copain. C'était un rouquin au visage rempli de tâches de rousseur, je l'aimais beaucoup.
Je pense que maintenant toutes ces maisons n'ont plus les mêmes habitants.
Je prolongeai mes souvenirs en allant quelques rues plus bas, plus près de la rade, et je regardai le balcon de ton appartement, maman, après que tu aies vendu la maison trop grande pour toi toute seule. Tu l'avais acheté parce que tu voyais le Pont de Plougastel de ton balcon, au dernier étage. Je ne m'attardai pas, des souvenirs moins joyeux me rattrapaient.
J'allais alors dans ce jardin public, le coeur un peu battant, je n'y étais pas retournée depuis... mon enfance. C'est là que j'ai passé des heures avec mon Bézo dont j'avais la garde dès sa naissance, j'avais alors huit ans! Oui, mon coeur battait en poussant le portail. Avait-il changé ce jardin? Avait-il toujours son joli pont, ses bosquets où nous nous cachions (encore)?
Oui, rien n'avait changé et pourtant cinquante deux ans séparent ces deux photos, un demi siècle!!!
Je fis le tour du parc, je m'approchai d'un arbre espérant y découvrir "nos" inscriptions d'amours enfantines que nous creusions dans l'écorce avec un canif, mais non, je ne vis rien. Je fis semblant de deviner quelque chose.
Je pris une dernière photo, de l'entrée du parc où j'apercevais le pont. Je me revis avec toi quand tu étais dans ton landeau anglais bébé, je t'emmenais déjà dans ce jardin, on me voyait à peine, le landeau était aussi haut que moi. Je me sentais à 9 ans une responsabilité immense... heureusement que le parc n'était qu'à deux pas de la maison.
Mon pèlerinage se termina dans ce parc, j'étais emplie d'un sentiment bizarre, entre sourire et larmes, un peu oppressée, la seule chose vraiment intacte c'était ce jardin. C'est vraiment beau de savoir que l'on a préservé un peu de nature, dans un quartier qui pour moi n'a plus d'âme si ce n'est celle de mes souvenirs, vivaces.
Je passai devant l'arrêt de bus pour rejoindre ma voiture. Combien de fois avons-nous couru pour le rattraper à la station suivante quand nous l'avions raté à celle-ci?
Ce fut tout de même une rude et belle journée.
A mon retour j'ai envoyé les photos à mon Bézo qui m'a répondu tout de suite :
"je reconnais tout! ben tu vois c le meme pont !! super 52 ans apres ! je vais les envoyer a m."
(M. c'est sa fille).
Au cimetière sans prier, puis prières en dégustant des moules, comme chaque année, et en contemplant à travers les vitres le port de plaisance, sous la pluie. Cependant l’année dernière il faisait beau, si beau qu’une vieille femme voulut se baigner et s’enfonça dans la vase. Mais les éclaircies sont promptes à faire la nique au ciel gris et je pus prendre mon café sur la terrasse. Le ciel breton c'est un magicien qui fait disparaître les nuages dans son chapeau, il en sort un soleil en l'espace de quelques minutes...
D’habitude je reste là, durant une petite heure, à me balader sur le port de plaisance. Cette fois je me décidai à retourner sur les lieux de mon enfance. Pas de chance, la rue où j’habitais était en travaux ; déviation. Je dus donc me garer plus loin, en face de ce mur au graffiti étonnant. Je le trouvais beau, le travail était minutieux.
(Cliquer deux fois pour voir les détails)
Plus tard je fis une recherche sur Internet pour trouver l’auteur (on trouve vraiment tout sur la Toile) et je dénichai cette photo du « graffiteur » en plein travail.
J’arrivai dans « ma » rue, en l’empruntant par le haut, les travaux s’arrêtaient juste devant la maison de mon enfance.
En voyant tous ces fils électriques et téléphoniques traverser le ciel et la maison je me dis : ce serait bien que les travaux soient des travaux d’enfouissement de tous ces fils peu esthétiques. La maison a été repeinte. Le bruit des pelleteuses et marteaux piqueurs agressent mes oreilles mais n'occultent pas mes souvenirs : au rez-de-chaussée (c'était en fait le sous-sol avant) cette devanture avec des hublots est étrange, je ne sais pas si c'est toujours un cabinet de kinésithérapie, c'est ce qui existait après que mes parents aient vendu l'épicerie à un kiné. Je revois la devanture de l'époque où nous étions avec ma grande soeur, maman et ma tante; la photo ci-dessous doit dater de 1955 (?), ce devait être l'été puisque les volets étaient clos.
Au premier étage, la fenêtre de droite : la cuisine, celle de gauche : la salle-à-manger, le salon en prolongement donnant sur le jardin à l'arrière de la maison.
Au deuxième, ma chambre à droite et celle de ma soeur aînée, à gauche la chambre de mes parents. Derrière donnant sur le jardin, celle de mon grand-père. Oui, à l'époque les enfants gardaient leurs parents avec eux, même si parfois c'était un calvaire.
Au dernier étage : la chambre de mon frère à droite, celle de la "bonne" à gauche. C'est ainsi qu'on appelait une femme de ménage logée et nourrie, à cette époque-là. A l'arrière toujours sur le jardin : le grenier, notre caverne d'Ali Baba. Nous y jouions à la dînette ou au Meccano avec mon frère. Nous y invitions nos petits copains et copines.
J'aimerais pouvoir pousser la porte pour voir le jardin. Le saule pleureur que tu avais planté papa et qui te désespérait parce qu'il ne poussait pas assez vite, semble avoir pris de l'envergure, j'en aperçois le sommet.
Je continue ma promenade jusqu'au "château"; c'est le nom que nous donnions à cette bâtisse où je fus invitée bien souvent à des parties de cache-cache. Le petit garçon du lieu était mon petit copain. C'était un rouquin au visage rempli de tâches de rousseur, je l'aimais beaucoup.
Je pense que maintenant toutes ces maisons n'ont plus les mêmes habitants.
Je prolongeai mes souvenirs en allant quelques rues plus bas, plus près de la rade, et je regardai le balcon de ton appartement, maman, après que tu aies vendu la maison trop grande pour toi toute seule. Tu l'avais acheté parce que tu voyais le Pont de Plougastel de ton balcon, au dernier étage. Je ne m'attardai pas, des souvenirs moins joyeux me rattrapaient.
J'allais alors dans ce jardin public, le coeur un peu battant, je n'y étais pas retournée depuis... mon enfance. C'est là que j'ai passé des heures avec mon Bézo dont j'avais la garde dès sa naissance, j'avais alors huit ans! Oui, mon coeur battait en poussant le portail. Avait-il changé ce jardin? Avait-il toujours son joli pont, ses bosquets où nous nous cachions (encore)?
Oui, rien n'avait changé et pourtant cinquante deux ans séparent ces deux photos, un demi siècle!!!
Mon Bézo sur le petit pont
Je fis le tour du parc, je m'approchai d'un arbre espérant y découvrir "nos" inscriptions d'amours enfantines que nous creusions dans l'écorce avec un canif, mais non, je ne vis rien. Je fis semblant de deviner quelque chose.
Je pris une dernière photo, de l'entrée du parc où j'apercevais le pont. Je me revis avec toi quand tu étais dans ton landeau anglais bébé, je t'emmenais déjà dans ce jardin, on me voyait à peine, le landeau était aussi haut que moi. Je me sentais à 9 ans une responsabilité immense... heureusement que le parc n'était qu'à deux pas de la maison.
Allez, une dernière, pour la route, avec ces deux bancs tout neufs!
Mon pèlerinage se termina dans ce parc, j'étais emplie d'un sentiment bizarre, entre sourire et larmes, un peu oppressée, la seule chose vraiment intacte c'était ce jardin. C'est vraiment beau de savoir que l'on a préservé un peu de nature, dans un quartier qui pour moi n'a plus d'âme si ce n'est celle de mes souvenirs, vivaces.
Je passai devant l'arrêt de bus pour rejoindre ma voiture. Combien de fois avons-nous couru pour le rattraper à la station suivante quand nous l'avions raté à celle-ci?
Ce fut tout de même une rude et belle journée.
A mon retour j'ai envoyé les photos à mon Bézo qui m'a répondu tout de suite :
"je reconnais tout! ben tu vois c le meme pont !! super 52 ans apres ! je vais les envoyer a m."
(M. c'est sa fille).