lundi 14 mars 2016

Adorable!


Je m'étais promise de ne plus prendre mon appareil photo quand je joue au golf. Tsss! Photo prise à 11 h 54 (heure précisée via mon appareil) ce matin. La lumière et les palmiers donnaient un petit air méridional à notre golf. Je n'avais plus besoin de balayer du regard les fairways, comme un mirador, en espérant voir mon adorable partenaire. Je ne le voyais plus depuis pas mal de temps.

 

Je montais rarement sur ce trou - en hauteur - au départ (d'hiver) des hommes. Je constatais qu'ils avaient une jolie vue. 
Mal joué aujourd'hui. Pas d'énergie. Ma balle a atterri dans le bunker "écossais"; j'ai mis trois coups pour en sortir (mais, je n'ai pas été ensevelie dans une avalanche de sable).

Sur la route du retour, dans ma voiture, j'allumais la radio et j'entendais la Pastorale. Je montais le son  (tant pis pour mes acouphènes). Cette musique accompagnait bien les virages, nombreux, de cette route sinueuse (et dangereuse). Ça faisait longtemps que je n'avais pas écouté cette symphonie. Elle s'accordait bien avec cette route de campagne et, les pensées qui m'emplissaient, légères (malgré tout) et aériennes.

 

Des souvenirs d'une balade à vélo - le long de la côte du Guilvinec jusqu'à la pointe de Penmarc'h - me revenaient en mémoire... Laissons les souvenirs, je vis le présent... en l'inventant sans doute, un peu.
"Adorable!"

ADORABLE. Ne parvenant pas à nommer la spécialité de son désir pour l'être aimé, le sujet amoureux aboutit à ce mot un peu bête : adorable!

[...]
Par une logique singulière, le sujet amoureux perçoit l'autre comme un Tout (...), et, en même temps, ce Tout lui paraît comporter un reste, qu'il ne peut dire. C'est tout l'autre qui produit en lui une vision esthétique : il le loue d'être parfait, il se glorifie de l'avoir choisi parfait; il imagine que l'autre veut être aimé, comme lui-même voudrait l'être, non pour telle ou telle de ses qualités, mais pour tout, et ce tout, il le lui accorde sous la forme d'un mot vide, car Tout ne pourrait s'inventorier sans se diminuer : dans Adorable! aucune qualité ne vient se loger, mais seulement le tout de l'affect. Cependant, en même temps qu'adorable dit tout, il dit aussi ce qui manque au tout; il veut désigner ce lieu de l'autre où vient s'accrocher spécialement mon désir, mais ce lieu n'est pas désignable; de lui, je ne saurai jamais rien; mon langage tâtonnera, bégaiera toujours pour essayer de le dire, mais je ne pourrai jamais produire qu'un mot vide, qui est comme le degré zéro de tous les lieux où se forme le désir très spécial que j'ai de cet autre-là (et non d'un autre).

Roland Barthes, in Fragments d'un discours amoureux, éditions du Seuil, 1977.

Je divague, oui! Qu'on me laisse divaguer... avec Barthes!

Hier, longue promenade dominicale l'après-midi avec mon amie, ici. La foule partout, nous l'avons un peu évitée en choisissant ce lieu. Je lui disais, en riant, que je préférais finalement l'autre petit port pour la dispersion de mes cendres dans la lande sauvage. Et je revoyais cette scène délirante du film  des Frères Coen, The Big Lebowski!