Incroyable ce changement d'éclairage selon l'endroit d'où est prise la photo : couleurs chaudes ou couleurs froides. J'imaginais un soleil couchant chez les Inuites (de luxe) puis une nuit éclairée par la lune.
Noël n'est que dans six semaines, rien ne nous sera épargné, pour ne pas l'occulter. Et, toutes les vitrines n'ont malheureusement pas cette simplicité esthétique. Je me demande d'ailleurs si la vitrine était terminée ou en cours de réalisation. A revoir...
Celle-ci, du même magasin, avec de très beaux santons...
Je ne sais pas si c'est de voir ces vitrines qui m'a rendu mélancolique en rentrant, je déteste cette période à venir; il en faut peu en ce moment pour que je m'y vautre, dans la mélancolie. C'est sans doute pour cela que je m'exprime avec tant de légèreté, de futilité, ici ou là...
Mais la vie est belle nom d'une pipe. Secoue-toi! Vite, reprends ton heureuse lecture :
"Ce soir, un chat a poussé la fenêtre tandis que j'écrivais, et tout à coup ses yeux ont été devant les miens. J'avais eu peur. Nous nous sommes regardés un moment, très silencieux, très fixes. Esprit bon ou esprit mauvais?... J'hésitais entre l'envie de l'appeler sur moi et celle... Finalement, tandis que nous étions perdus dans une contemplation mutuelle, j'ai fait : Psshh!... Et il a détalé.
Je reste confondu par l'intensité du plaisir que j'ai trouvé, pendant quelques minutes, dans les yeux de ce chat. Je pense toutefois qu'on peut comprendre que les hommes trouvent plaisir à regarder les chats, mais quel plaisir les chats trouvent-ils à regarder les hommes?... Plus j'y songe, moins je puis imaginer que celui-ci soit venu sans intention. A elle seule, la manière décidée dont il a poussé la croisée, dont il s'est introduit dans ma chambre, aurait dû m'avertir : il avait l'allure, la démarche des êtres qui accomplissent une mission. Ce regard, je l'ai déjà rencontré ailleurs, c'est la seconde fois qu'il m'atteint. Je revois maintenant cette grande salle d'auberge, toute vide, dont nous savourions la fraîcheur après des heures de marche sur la route ensoleillée, et où nous écoutions le bruit régulier de l'horloge au balancier de cuivre. Un chien, un grand berger allemand, poussa la porte, sans bruit, s'avança vers nous, avec cette absence d'hésitation si étonnante chez un animal et, s'asseyant devant elle, devant l'Amie, de l'autre côté de la table, à distance, se mit à la regarder patiemment, en plein visage, comme s'il la connaissait, ou comme s'il voulait l'avertir de quelque chose... Il n'avait eu ni un jappement, ni un aboiement; pas un son ne sortait de sa gorge, et une telle gravité dans l'attitude nous en avait tout de suite imposé. Au bout d'un long moment, il partit comme était venu... Nous dûmes attendre longtemps encore avant de pouvoir toucher nos verres.
Je connais beaucoup d'imbéciles qui riraient s'ils lisaient ceci."
Paul Gadenne, in La rue Profonde, éditions Le Dilettante, 1995.
Je remercie vivement l'ami qui m'a parlé de cet écrivain et donné envie de le lire.