Ce matin 11h.
Je prépare toujours une liste de choses à lui dire, de médicaments à lui demander, je prévois de lui parler de tas de petits maux qui me minent.
Puis quand je suis en consultation, j'occulte ma liste, sauf tout de même pour mes migraines, il me fallait lui demander de me prescrire un médicament qui remplacerait mon cher Propofan désormais interdit.
Vint le moment de la prise de tension, je l'appréhendais, ce matin après mon réveil elle était normale, voire plutôt basse mais je savais qu'elle devait avoir bien remontée. Effectivement, elle était limite pour la prescription d'un hypotenseur : mes questions sur les résultats de l'anapath m'avaient un peu stressée et mes joues en feu en étaient la cause j'en suis sûre. Je le lui dis, elle a souri, c'est ma nouvelle généraliste, c'est la troisième fois que je la vois, elle avait fait refaire la décoration de son bureau, changé le mobilier depuis ma dernière visite, tout était superbe, je le lui dis. "Je peux enfin l'agencer comme je veux" me dit-elle; (elle partage le cabinet avec un autre médecin), elle a très bon goût, j'y accorde de l'importance, les cabinets médicaux sont souvent si déprimants. Elle est jeune, elle devrait donc pouvoir me suivre jusqu'à ma mort (0_0). Je n'ai pas encore osé lui parler de l'ADMD, de mes déclarations anticipées et tout ça, j'avais pourtant préparé une photocopie pour elle. J'attends qu'elle me connaisse un peu mieux. Allons-y doucement... ne pas la bousculer avec mes sujets favoris.
Je m'en voulais en sortant de ne pas lui avoir demandé tous les médicaments que j'avais listés et surtout les somnifères. Pas pour en prendre (je n'en ai jamais pris de ma vie), juste pour en avoir sous le coude!
A la pharmacie je regarde la composition de ma nouvelle molécule pour les migraines, youpi : paracétamol, opium et caféine, c'était aussi ce qu'il y avait dans les optalidons, mes petites pilules roses, celles que prenaient mon père, ma tante puis moi pendant des années, les seules qui dissipaient mes maux de tête instantanément. Une merveille interdite depuis longtemps.
15 h. Au golf. Au trou numéro 3 je rattrape un couple; lui me propose de jouer avec eux puisqu'ils attendent aussi, la partie devant eux est lente. J'acccepte volontiers; présentations : ils sont en vacances dans la région. Elle, très BCBG , pas souriante, lui plus cool. Après quelques trous, elle s'est détendue. Au final, ce fut agréable.
Retour at home. Silence...
21 h 45. Je viens de regarder Jean d'Ormesson invité dans La Grande Librairie avec Jean-Didier Vincent et Jean-Bertrand Pontalis. Jean d'Ormesson a toujours de l'humour, de l'esprit, de l'élégance et ce soir il nous parle de sa mélancolie. Je ne sais pas si c'est un homme délicieux dans la vie privée mais à écouter il l'est. Je n'aurais pas attendu d'avoir son âge (sans doute ne vivrais-je pas aussi longtemps) pour parler de la mort :
"A mon âge il faut se décider à aimer la mort" et plus loin il rajoute : "Si Dieu me proposait de recommencer une nouvelle vie, je refuserais. Une vie suffit. C'était bien". C'était exactement les termes de Bernard Kouchner l'autre jour dans Empreintes, qui déclarait être pour l'euthanasie, en précisant que c'était un mot horrible (cest vrai), que nous devrions avoir le droit de décider de notre mort et que le suicide n'était pas interdit. "Il arrive un moment où on doit pouvoir dire : merci, ça suffit, cétait bien". J'applaudis très fort.