mercredi 24 juillet 2013

Je ne savais pas alors ce qu'était le bonheur...

Lundi 22 juillet.

RDV à Brest à 14 h 30 : tests vertiges puis consultation ORL. Arrivée avec un quart d'heure de retard, j'avais pourtant pris de l'avance. Mon GPS est nul, il n'a pas tenu compte du nouveau tramway qui empêche la circulation dans les artères principales. Nul nul nul! Arrivée stressée mais personnel de l'hôpital compréhensif. Je venais de loin pour cette consultation. Toubib épatant.
Je passe...
J'en sors trois heures plus tard après avoir bien macéré dans mes vêtements, chaleur étouffante à l'hôpital. 
Besoin urgent de prendre l'air, de sentir l'air, de le respirer. J'avais à peine déjeuné, j'avais faim et soif. Je reprends la voiture, je traverse la ville, je passe devant la maison de mon enfance, je vais au Tour du Monde. J'avais envie d'une glace pleine chantilly, ils n'en font pas. Ils me proposent un Magnum. Je dis OK et vais m'installer là, pour le déguster. Bonheur de l'instant.



Je suis bien, pas envie de décoller. J'aperçois le Pont de Plougastel à travers les mâts des bateaux à droite; il me vient une idée. Au lieu de rentrer directement à Quimper, je vais prendre la bretelle après le Pont pour aller au Passage, là où tu m'emmenais papa quand j'avais entre 10 et 15 ans. En y pensant j'en gardais un souvenir un peu flou. Quelle bonne idée! me dis-je.  J'ai fini mon Magnum; j'ai réussi à le manger sans que ça dégouline.  Je regarde le port de plaisance, tout est si calme à cette heure, l'air est vivifiant, la chaleur supportable; je ne suis pas pressée de reprendre la route. Le cimetière est à deux pas; j'y fais un arrêt pour arroser les plantes que nous avions déposées, avec ma soeur,  début juillet, avant la canicule. Je m'attendais à la  catastrophe; pas besoin de les arroser, elles étaient mortes. Hop! à la poubelle. Salut mes chers disparus...

Oui, c'est décidé je vais m'arrêter au Passage. A la sortie par la bretelle il y a un rond-point qui bien sûr n'existait pas. Tout change... mais Le Passage est bien indiqué et le chemin  pour y arriver est toujours aussi pentu et fleuri. J'avais peur de cette descente en voiture avec toi papa, peur que les freins lâchent mais j'appréhendais encore plus la remontée, peur que ta voiture n'y arrive pas; il fallait pousser le moteur. J'imaginais que tu calais et que tu ne pouvais plus remonter la côte. J'ai un peu gardé cette phobie quand je conduis sur des chemins ou des petites routes étroites très pentus;

J'arrive, la petite chapelle Saint Languis est toujours là.




J'ai le coeur qui bat. Je suis excitée et sereine. Rien n'a changé. Ô papa, tu es là près de moi.
Rien de surfait, ni de superficiel ici; même pas un bistrot pour se désaltérer, tant mieux. Dans la petite anse, quelques baigneurs, il est 19 heures, la mer est haute, calme comme un lac. 



Quelques pêcheurs... La belle villa existait déjà. L'école d'aviron aussi. 





Tu venais le dimanche laver ta voiture ici; je t'aidais; je ne savais pas alors ce qu'était le bonheur : c'était cela. La vue sur le Pont de Plougastel est belle; le pont est maintenant "doublé" avec le Pont de l'Iroise et, vu d'ici c'est très beau, les haubans ne déparent pas avec les arches, c'est harmonieux. Il y a de la brume de ce côté-là et je prends les photos en contrejour. 



Il faudrait savoir raconter, décrire, écrire tout cela : simplicité, authenticité, beauté. Je souris, je suis là, seule avec mes souvenirs et c'est magnifique. La petite fille sur cette photo n'oubliera jamais j'en suis sûre cet instant avec son père.


Je suis restée quarante cinq minutes à regarder la mer, c’eût été un beau moment pour mourir. Mais il fallait rentrer. Au retour j'étais emplie de ce passé et enveloppée d'un bien-être que je n'avais ressenti depuis longtemps. Je n'allumais pas la radio, la musique était intérieure.