mercredi 1 mai 2013

De, la réflexion

Mardi 30 avril.

Vacances scolaires obligent. Le parcours était encombré. Je la rejoins au 2 et lui propose que nous jouions ensembles même si je sais qu'elle préfère jouer seule. Elle accepte, l'attente sera plus agréable à deux me dit-elle, se défendant ensuite de mal jouer. Je rêverais de jouer comme elle si je vivais jusqu'à 93 ans. Je lui dis que je suis contente de la revoir. Je ne joue pas l'hiver me dit-elle. C'est plus raisonnable lui dis-je. Mais alors que faites-vous, vous ne vous ennuyez pas? Je ne m'ennuie jamais réplique-t-elle avec un sourire malicieux : "j'écris des poèmes, je joue du piano, je fais des aquarelles." Je n'en reviens pas. Quelle délicieuse femme! Et elle rajoute : "et puis, il y a des animations au Jardin d'.", la résidence de retraite (qui n'est pas un mouroir) où elle séjourne depuis ses 80 ans. A cinq minutes du golf en voiture, et en plus, elle conduit. Et comme je prenais des nouvelles de sa santé, elle me dit : "bien sûr ce n'est plus comme avant, mais je n'ai aucunes douleurs, je n'en ai jamais eues! Dans le ton de sa voix il y a une fermeté, une autorité, une assurance qui me laisse à penser qu'elle va vivre encore longtemps.
Je pensais alors que c'était un témoignage merveilleux et me demandais pourquoi moi, bien plus jeune tout en ne l'étant déjà plus, j'ai de l'arthrose et des douleurs récurrentes. Peut-être parce que je n'ai pas envie de vivre jusqu'à 93 ans. Il faut avoir envie de vivre pour vivre longtemps, je le crois, j'en suis sûre. L'envie de vivre occulte sans doute les douleurs.

Soirée :

Je regarde ma terrasse au crépuscule à travers les vitres (propres, nettoyées dimanche). Amusant la lampe du salon près des plantes, magie de la réflexion (j'avais écrit réflection; je pensais à la lumière se réfléchissant dans la vitre).
Spleen du soir...



Mercredi 1er mai.

J'ai sorti quelques livres de ma bibliothèque ce matin et lu ce qu'écrivaient dans leur Journal Stendhal, Katherine Mansfield, Georges Bataille, Paul Nizon, un premier mai.
Un seul extrait :

Bloc-notes, mai 1917.
Dans ces notes - aide-moi, Seigneur, je jouerai cartes sur table...

"Quand on vit seule...
Même si, par un hasard épouvantable, je venais à trouver un cheveu sur ma tartine de miel.. au moins, ce serait un cheveu à moi.
[...]
"L'amour et les champignons.
Si on pouvait seulement distinguer l'amour vrai du faux, comme on distingue les bons champignons des mauvais. Pour eux, c'est si simple - on les saupoudre bien de sel, on les met de côté et on prend patience. Mais quant à l'amour, dès qu'on a découvert quelque chose qui lui ressemble, même de la façon la plus lointaine, on est absolument certain, non seulement que c'est un spécimen authentique, mais encore que c'est peut-être le seul et unique champignon véritable qui restât à cueillir. Et il faut un nombre effroyable de champignons vénéneux pour vous convaincre que la vie n'est pas tout entière un cèpe interminable."
Katherine Mansfield, in Journal."

Après-midi : 

Reçu visite impromptue  de ma filleule, son mari, et les deux enfants, mes nièces et neveux, avec la chienne. Ce fut durant deux heures une tornade? un ouragan? dans mon salon avec les enfants et la chienne, mais j'étais heureuse de les voir. Eclats de rire assurés et complices avec ma filleule. Je leur proposais d'aller à la crêperie le soir avec les enfants mais ils ont préféré reprendre la route pour la Normandie, de bonne heure.
Après les aboiements stridents (à crever mes tympans qui sont déjà mal-en-point) du caniche, le calme fut tout de même assez jouissif.