mercredi 27 mai 2015

Monologue ou, dialogue avec un mort

29 ans hier... que tu n'es plus là. Et pourtant tu étais mon ombre sur les greens, mon soleil derrière les nuages. A l'heure du déjeuner, le parcours était déserté, comme d'habitude et j'en ai profité pour m'attarder sur ce qu'on n'a pas le temps de voir, quand on est trop occupé par le jeu, surtout quand les joueurs sont nombreux.


A vagabonder dans ma tête, je n'ai pas très bien joué mais quelle jolie balade j'ai faite. Arrivée sur ce trou, je n'avais jamais remarqué qu'on apercevait l'Odet à travers la forêt. C'est fou ça; je parierai que peu de golfeurs tournent leur regard vers cette forêt, ou seulement pour y chercher leur balle arrivée là malencontreusement; ils sont alors plus préoccupés à la retrouver qu'à contempler la lumière scintillante de la rivière. J'abandonne un instant mon sac et mon chariot, je sais qu'il y a deux joueurs qui me suivent mais j'ai deux trous d'avance; j'ai donc un peu de temps pour aller jusqu'à la rivière.


J'escalade un petit talus et je m'émerveille d'être là dans la clairière de cette petite forêt.



Je crains de ne pas pouvoir vraiment m'approcher de l'eau. Un chemin longe la rivière et on doit pouvoir faire une belle balade. D'ailleurs c'est bien dégagé de broussailles et autres ronces. Je pense que prochainement je reviendrai, sans faire de golf, me promener dans cette forêt en bordure de l'Odet.


Je zoome pour tenter de prendre le bateau (canoë?) qui glisse sur l'eau de l'autre côté mais je n'ai pas été assez rapide même si on les aperçoit (en cliquant pour agrandir).

Ça sent bon, un mélange de mousses et d'algues. Petit-moment-de-bonheur dans le silence. Je ne dois tout de même pas trop traîner. Si les joueurs arrivent et me voient sortir du bois ils vont penser que j'ai fait un arrêt pipi. 
Je continue mon parcours de golf... Trou suivant, drive moyen, petit slice, pas grave puisque je t'imagine caché derrière ces genêts, riant dans ta barbe, ayant évité ma balle de justesse.


Comment veux-tu que je joue bien quand je t'ai dans la tête. Et je t'ai dans la tête à chaque fois que je joue au golf toute seule. Je ne me concentre pas sur ma balle. Tsss! Bon, quelquefois j'arrive à me concentrer en pensant à toi mais aujourd'hui c'est la date de l'anniversaire de ta mort, alors, je pense trop à toi pour bien jouer. Et là, elle a atterri dans un bunker!


Tiens, un caillou bien rond dans le bunker à côté de ma balle. Je m'approche : il a l'air bien lisse ce caillou. Je le prends dans ma main et que vois-je? un oeuf! Comment est-il arrivé là? Tombé d'un nid? Il n'y a pas d'arbre ici. Personne ne me voit, j'ai une envie irrésistible de le sortir du bunker avec mon club; peut-être vais-je délicatement le faire atterrir sur le green. Hum! Splash! Pas sur le green mais dans le bunker. Oups!


C'est la première fois (après 35 ans de golf) que je tape dans un oeuf (0_0). St Andrews me pardonnera.
 

J'ai ratissé le bunker soigneusement pour cacher les traces jaunes mais j'ai laissé la coquille éclatée dans le sable. Hein? Quoi? Pardon? Tu me dis que je suis gonflée? Que ce n'est pas élégant d'avoir pulvérisé cet ouf oeuf? Ah non? Tu me dis que je suis une môme! Ça oui, tu as raison.
Pas de joueurs à l'horizon ni derrière moi (ils ne sont pas rapides depuis le temps que je traîne).
Trou suivant, je change de balle, je vais mieux jouer c'est sûr. Drive bien parti, tout droit mais pas très puissant. Le repère, la mire, normalement j'aurais dû être plus près d'elle. Je vais me rattraper au second coup, en aveugle.



Impeccable. Approche/putt et j'ai fait le PAR. Allo? T'es toujours là? T'as vu ce coup de bois 7 que j'ai fait? Tu te rappelles, mon premier bois 7, en persimmon*, que tu m'avais offert, c'est resté mon club fétiche. Je ne rate jamais de balle avec ce club. Ah si tu revenais sur terre, tu serais étonné de voir la légèreté des clubs maintenant, le matériel est - paraît-il - de plus en plus performant. Je rigole. Même les débutants ne parlent plus que de "degrés" d'ouverture de leur driver, de leur sandwedge. Ils sont très pointus techniquement parlant ces débutants. Moi je dis qu'un bon golfeur jouera toujours bien avec n'importe quel matériel et un mauvais toujours mal même avec du bon matériel. En revanche, il y a des vieux (surtout chez les hommes, hé hé) qui jouent pas mal - enfin qui "scorent" pas mal - avec un swing minimaliste pour ne pas dire minable. Bon, j'arrête de te parler.
*(Ça revient à la mode..)

Oh! En voyant aujourd'hui ce monticule avec ses plantations sauvages au milieu du bunker... 




... je pense à un ami qui m'a envoyé récemment une photo d'un bunker au milieu d'un rond-point en Suisse! C'était très étrange, mais, il annonçait qu'un golf était proche.

Je suis sur le dernier trou, les deux joueurs qui me suivaient ont fini par me rattraper, normal avec mes arrêts photos.  Il est 14 heures, les engins ont repris la tonte et, j'ai un petit creux à l'estomac; il y en a un qui se planque derrière l'arbre pour que je puisse jouer. C'était chouette cette partie de golf (plutôt une balade aujourd'hui) avec toi