mercredi 29 avril 2015

Baisser le son pour mieux entendre

Deux femmes d'un certain âge  (le mien) dans la salle vide, séance de 14 heures. Deux femmes d'un certain âge, seules, elles ne se connaissent pas et pourtant, se reconnaissent. Seules dans cette salle, elles échangent un regard, complice. Sans doute attirées par le titre du film qu'elles sont venues voir : Une belle fin (Still Life).
Elle et moi sommes venues, c'est une évidence, appréhender ce qui nous attend, peut-être; nous conforter dans notre solitude, de ce que pourrait être notre fin... si nous n'avions pas de famille. En a-t-elle? Je ne sais pas, j'en ai. Ce qui fait toute la différence avec le sujet du film. Cependant, il ne suffit pas d'avoir une famille pour mourir seul(e).
Un film poignant de bout en bout, sur la solitude humaine. Une fin inattendue. Un hymne à la vie avec des séquences de chaleur humaine, émouvantes et généreuses. L'acteur Eddie Marsan pourrait jouer dans un film muet tant il est expressif. Je dirais : expressif-minimaliste.




Eddie Marsan, bouleversant

"Modeste fonctionnaire dans une banlieue de Londres, John May se passionne pour son travail. Quand une personne décède sans famille connue, c’est à lui de retrouver des proches. Malgré sa bonne volonté, il est toujours seul aux funérailles, à rédiger méticuleusement les éloges des disparus… Jusqu’au jour où atterrit sur son bureau un dossier qui va bouleverser sa vie : celui de Billy Stoke, son propre voisin."

Réalisé par Uberto Pasolini (sans lien de parenté avec Pier Paolo Pasolini mais avec Luchino Visconti dont il est le neveu).
Interview, extrait :

A y repenser, tous vos films ont un petit air de famille!

Parce que je reviens toujours au même genre d’histoire: des gens modestes confrontés à l’écart entre un rêve et la réalité. Les destins exceptionnels ne me parlent pas du tout. Ce qui m’intéresse, c’est trouver l’extraordinaire dans le quotidien. C’est trop facile de faire des films en poussant le volume à fond, l’action, le drame et la musique. Le spectateur sera secoué sur le moment mais n’en gardera pas grand-chose. En revanche, si vous baissez le volume, vous en perdrez bien sûr un bon nombre, mais vous aurez une chance de toucher vraiment certains. Le maître absolu dans ce style, c’est le Japonais Yasujiro Ozu. Sa grammaire est très simple. Résumés, ses films n’ont pas l’air très excitant. Et pourtant, il est difficile de trouver plus émouvant et universel. En toute modestie, Still Life lui doit beaucoup.
 
Comment avez-vous pensé à Eddie Marsan, qui est extraordinaire dans ce film?
 
Je ne voulais surtout pas d’une star, pour qu’on puisse vraiment croire à la réalité de ce personnage, à son job, à sa générosité, à son inconscience de sa propre solitude. Eddie a joué dans beaucoup de films, mais en général des seconds rôles plutôt outrés, y compris chez Mike Leigh. Je l’avais repéré en valet de Napoléon dans The Emperor’s New Clothes, mais il a dépassé toutes mes attentes. C’est un comédien fabuleux qui ne donne même pas l’impression de travailler. La vérité du personnage lui doit énormément.

 (Uberto Pasolini dans un entretien à lire :  Le Temps.ch)

Mostra de Venise 2013 : Prix Horizons du meilleur réalisateur (sélection « Orizzonti ») pour Une belle fin (Still Life)