samedi 11 juin 2016

"Ah, le portrait, le portrait avec la pensée, l'âme du modèle, cela me paraît tellement devoir venir." *

* Vincent à Théo, Arles, septembre 1888.



Portrait de l'artiste par lui-même.
Paris, été 1887, huile sur carton, 19 x 14 cm.
Amsterdam, Rijksmuseum Vincent Van Gogh


 L'homme à la pipe : Autoportrait, Vincent Van Gogh.
Arles, janvier 1889, huile sur toile, 51 x 45 cm.
Londres, collection particulière

Les portraits que Vincent peignit de lui-même il y a un siècle sont sa gloire. Scruter leur regard, chercher à en déchiffrer le silence et le mystère, c'est devoir violer la mémoire de Vincent.

En Janvier 1890 paraît dans le Mercure de France un article d'Albert Aurier, "Les Isolés". Éloge émerveillé de la peinture de Vincent  dont six toiles sont accrochées à la VIIIe Exposition des Vingt à Bruxelles. (Parmi ces toiles - Un paysage au soleil couchant, La Vigne rouge, Une vue d'Arles, Un coin du parc à l'asile Saint-Paul.)
Le 29 avril 1890 Vincent demande : "Veuillez prier M. Aurier de ne plus écrire d'articles sur ma peinture, dis-le-lui avec instance, que d'abord il se trompe sur mon compte puis que réellement je me sens trop abîmé de chagrin pour pouvoir faire face à de la publicité" et, dans le post-scriptum d'une lettre qu'il envoie alors à sa mère et à sa sœur, il précise : "Quand j'ai appris que mes œuvres avaient un peu de succès et que j'ai lu l'article en question, j'ai craint immédiatement que cela me décourage. Il en va presque toujours ainsi, dans la vie du peintre; le succès est ce qu'il y a de pire."
"... en général, mais plus spécialement lorsqu'il s'agit des artistes, je prête autant attention à l'homme qui produit l’œuvre qu'à l’œuvre elle-même."
"Il m'a toujours semblé qu'un artiste qui montre son œuvre en public, a le droit de garder pour lui les tourments de sa vie privée. Ceux-ci découlent directement, fatalement, des difficultés propres à la création d'une œuvre d'art."
Le "mode d'emploi" que donnent ces phrases pour déchiffrer une œuvre indique l'essentiel. Les péripéties de la vie d'un homme n'expliquent en rien son œuvre. Contresens sans issue. A l'inverse l’œuvre même, son enjeu, son exigence et ses défis décident d'une vie. La vie de Vincent n'est que la quête de la peinture. Et cette quête est une lutte.
"J'ai trente ans, mon front est labouré de rides, les traits de mon visage en accusent quarante, mes mains sont crevassées."
Vincent à Théo, La Haye, 1er juin 1882.

"Je voue une foi totale à l'art, il s'ensuit que je sais ce que je veux exprimer dans mes œuvres, et que je tâcherai de l'exprimer, dussé-je y laisser ma peau."
Vincent à Théo, Nuenen, août-septembre 1885.

"Le peintre de l'avenir, je ne puis me le figurer vivant dans de petits restaurants, travaillant avec plusieurs fausses dents et allant dans les bordels de zouaves comme moi."
Vincent à Théo, 5 mai 1888.

"Un tableau est aussi difficile à faire qu'un diamant gros ou petit à trouver. Maintenant, si tout le monde reconnaît la valeur d'un louis d'or ou d'une perle fine, malheureusement, ceux qui font cas des tableaux et qui y croient sont rares. Mais ils existent, cependant."
Vincent à Emile Bernard, Arles, septembre 1888.

(Textes et images tirés de l'ouvrage de Pascal Bonafoux, VAN GOGH PAR VINCENT)



("Publicité" trouvée dans un quotidien...)

Prochainement au Musée des Beaux-Arts à Quimper,
Autoportraits du Musée d'Orsay, du 17 juin au 2 octobre 2016.