dimanche 19 octobre 2014

Envie d'avoir envie

Mon journal : moins je parle de mon quotidien et moins j'ose le faire.
Je me demande comment j'ai pu oser en parler.
Je ne me posais pas la question.
Et puis, il se passe tant de choses dans une journée, même quand on ne fait rien.
J'ai changé de matinale, j'écoute France Musique. Tout passe tout lasse.
J'ai vu une expo exceptionnelle la semaine dernière, en Bretagne, oui! en Bretagne, sans faire de queue dans un lieu magnifique, pour les 50 ans de la Fondation Maeght. Il faut que j'en parle et de Tal Coat aussi. Mais pas à la va-vite.
J'ai vu un film terrible dans tous les sens du terme, étrange, étouffant, époustouflant, sensuel, difficile d'en parler, tout m'est difficile, depuis des semaines et pourtant je vais bien, je vais mieux, je n'ai plus envie de mourir, enfin, pour le moment, mais je vieillis et tout se ralentit. Ce film, japonais, de Hiroshi Teshigahara est sorti en 1964 : La femme des sables. Non, je ne peux pas en parler, je ne sais pas parler des œuvres d'art.
Aujourd'hui je me suis promenée au bord de la mer, c'est l'été indien. J'ai pris l'avenue de la mer plus sauvage que l'avenue de la plage où la foule se pressait. J'étais bien, toute seule. Je croisais des couples silencieux, des familles avec des enfants, des femmes par deux ou trois; j'avais le temps de capter leurs paroles. Je remarquais que toutes ces femmes croisées étaient en train de dénigrer une autre femme, absente, collègue ou amie ou voisine, je ne sais pas. Je me disais que j'étais bien, seule, à regarder la mer. J'entendis aussi un homme qui disait à sa femme : "il fait plus frais qu't'à l'heure". Oui, j'étais bien, dans ma solitude. J'ai pris quelques photos. 







Je ne me suis pas rendue compte qu'il me faudrait faire toute cette marche dans l'autre sens. J'étais allée tout au bout du chemin piétonnier. En faisant demi tour j'ai senti la fatigue et, surtout, la chaleur; j'avais trop chaud. Je marchais plus lentement, je traînais même un peu la patte. J'avais envie de manger une glace, je ne pensais plus qu'à ça, ou plutôt, à arriver jusqu'à la terrasse du café. Mais c'était encore plus loin que mon point de départ, celui où j'avais stationné ma voiture. Je regardais ce ciel en contre-jour.



J'arrivais à la hauteur de ma voiture, je me tâtais : continuer à pieds jusqu'au café? Il me faudrait ensuite revenir jusqu'à ma voiture. J'étais trop fatiguée, c'était encore loin. J'ai repris ma voiture. Évidemment j'ai eu un mal fou à trouver une place pour me garer pas trop loin de mon but, le bistrot! Quel monde de ce côté-là. Hop! en voilà une qui est prête à partir, j'attends, la voiture derrière moi klaxonne, dans mon rétroviseur je vois une femme. M'en fiche, elle attendra. Garée, ouf!
Je trouve une place en terrasse. Plus envie de glace, j'ai soif, un thé vert à la menthe l'étanchera mieux qu'une glace. Un couple vient de quitter cette table, je peux faire une photo.


Il est 17 h 30. Dans ma voiture au retour, j'allume la radio et j'entends Johnny Hallyday. Il y avait longtemps que je n'avais pas chanté dans ma voiture. Je gueulais avec lui :
Qu'on me donne l'enviiiiiiiiiiiiie l'envie d'avoir enviiiiiiiiiiiiiie
Qu'on allume ma viiiiiiiiiiiiiiiiie!

Oui, j'avais envie d'avoir envie. Je suis vivante.