lundi 30 octobre 2017

Le divan du XXIe siècle

"Vous mentez... et Google le sait

Sexualité, boulot, loisirs... On passe notre temps à enjoliver la réalité sur les réseaux sociaux. Le chercheur Seth Stephens-Davidowitz s’est immergé dans le moteur de recherche de Google. Et a tiré un livre de ces petits arrangements avec la vérité.

«Sur les réseaux sociaux, chacun est heureux en ménage, en vacances dans les Caraïbes et lit la presse quotidienne. Dans le monde réel, beaucoup sont en colère, en train de faire la queue au supermarché, un œil sur un tabloïd et ignorant l’appel d’un conjoint avec qui ils n’ont pas couché depuis des années», affirme Seth Stephens-Davidowitz. On se doutait de cette dichotomie entre mythe personnel et réalité, mais ce data analyst a passé quatre ans immergé dans les recherches Google de ses contemporains pour en mesurer l’ampleur. Et publier ses conclusions, fin juin, aux Etats-Unis, dans un ouvrage intitulé Everybody lies, big data, new data, and what the internet can tell us about who we really are (Tout le monde ment, big data, nouvelles données, et ce qu’Internet peut nous apprendre sur ce que nous sommes vraiment).
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«Lorsque nous interrogeons Google, cela ne dit rien de nos états d’âme [...]. Or pour en faire un indicateur de vérité sociale, il faudrait identifier le contexte. D’autant plus que Google suggère des termes associés qui peuvent dévier les recherches individuelles.»

– Pourquoi certains en arrivent-ils à prétendre être dans des lieux où ils ne sont même pas?

– Nous sommes arrivés à la société de l’affabulation, du simulacre: notre rapport à l’identité passe désormais par tout un panel de médias qui deviennent des prothèses narcissiques où l’on peut inventer une nouvelle narration de soi pour soutenir un narcissisme défaillant. Et l’on finit presque par croire qu’on est cet alter ego qui passe ses vacances à l’autre bout du monde, car nous sommes aussi dans la société du faux self qui répond à l’exigence sociétale actuelle de triomphe, performance, jouissance… Mais en réalité, feindre finit par épuiser."

(Article de Julie Rambal, la suite : Le Temps.ch)

(A lire sur le sujet : Google révèle nos recherches secrètes Les Echos.)