lundi 27 février 2017

Plutôt mourir debout que de vivre à genoux

Hier, dimanche.
J'étais là, sous le ciel gris, dans l'air humide, légèrement frissonnante, dans un état fébrile. Il n'y avait personne sur le petit parcours. Le vent faisait larmoyer mes yeux encore plus que d'habitude, au point que parfois -pour ne pas dire à chaque coup - je voyais à peine la balle que j'allais taper. Personne - qui aurait pu me voir ce midi - n'aurait pu imaginer que je tenais tout juste debout et que, ce que j'essayais de surmonter c'était encore ces vertiges qui me tourmentaient depuis samedi matin. Surmonter aussi l'abattement, la solitude. Se révolter, se battre pour ne pas se laisser abattre ("Plutôt mourir debout que de vivre à genoux" L'Homme révolté, A. Camus). J'avais mis mon collier cervical pour conduire et je l'avais gardé pour jouer, m'empêchant ainsi de tourner la tête.  
Tout allait si bien depuis cinq semaines (du moins du côté des vertiges, pour le moral c'était autre chose)  et particulièrement depuis une semaine, mon jeu s'améliorait. Vendredi soir j'étais, sinon heureuse, revigorée. Je fis même ce billet sur "l'âne et le poney", assez tard, sans qu'aucune sensation vertigineuse ne s'installât, si ce n'était celle que m'inspirait Gena Rowlands.  
J'étais là ce matin pour tenter de relever le défi que je m'imposais : ne pas avoir plus de vertiges en jouant au golf que si j'étais restée sans bouger assise sur mon canapé à essayer d'occulter ce tournis, d'alléger cette tête si lourde quand la crise s'installe. Je ne jouais pas très bien, je marchais lentement. J'étais au fond du trou parcours lorsque je vis passer une voiture au loin... allant vers le parking du grand parcours...
Puisqu'il n'y avait personne, je remettais une ou deux balles quand je ratais mes coups mais je ne pouvais pas faire un plein swing, j'avais peur de déclencher un vertige rotatoire, celui qui me donne envie de mourir sur le champ. Je me rappelais soudain que j'avais oublié de mettre ma médaille autour du cou. J'avais des larmes plein les yeux mais je ne pleurai pas - du moins, pas en cet instant. Je terminais le parcours, fatiguée mais avec l'impression d'être moins vertigineuse. Mes chaussures étaient crottées, j'allais les nettoyer près du club house.
Ouf! dans ma voiture le larmoiement s'arrêta, je jetais un coup d’œil dans le miroir, mon rimmel waterproof n'avait pas fait de dégâts, simplement il n'y en avait plus "c'est l'dégel des amants/jolie môme" (pourquoi m'obstinais-je à en mettre pour venir au golf? Encore cette illusion de meilleure mine avec que sans), j'insérais Glenn Gould dans mon lecteur. Je me suis mise à rire : des images amusantes, improbables, me passaient par la tête. Je roulais doucement, sur mon chemin pas trop de croisements m'obligeant à tourner la tête. Tout allait bien. Ma tête était droite, quelques tensions cervicales, l'équilibre était précaire mais cette crise ne me laissait pas clouée, prostrée comme il arrive parfois. Je "positivais" (je déteste ce verbe ridicule), et puis, peut-être que quelqu'un pensait à moi...

Les hivers se suivent et ne se ressemblent pas toujours. Malheureusement et, heureusement. J'avais alors une énergie - mue par un sentiment amoureux - que je n'ai plus. Un an de plus n'arrange rien, l'énergie s'essouffle; les années pèsent de plus en plus lourd, en un an on en prend le double voire le triple; pour certain(e)s les kilos prennent la même ascension, pour d'autres c'est la descente sur la balance. Mmm!

Hier, malgré les vertiges, je postais ce billet, pour faire diversion. Écrire ici - n'importe quoi -, un moyen de ne pas rester fixée sur cet état, déprimant.




"Le sujet de l'inconscient ne touche à l'âme que par le corps" (Lacan)