mercredi 30 novembre 2011

***

Certains jours de tristesse je m'empresse de mettre du rimmel pour ne pas pleurer.
Ça ne marche pas toujours.

mardi 29 novembre 2011

L'Art d'Aimer


On le compare parfois à Eric Rohmer.
J’ai vu le dernier film de Emmanuel Mouret. Non, ce n’est pas du Rohmer mais on peut dire c’est du Mouret et c’est absolument délicieux :

"Cupidon du cinéma, il décoche, en guise de flèches, des comédies sentimentales piquantes (Fais-moi plaisir, 2009 ; Un baiser s'il vous plaît, 2007). Mais, cette fois, Emmanuel Mouret se pose en véritable expert de l'amour, pratiquement en sexologue. Reprenant une tradition de la comédie, le film à sketchs, il en fait une sorte d'étude de cas à sa façon.
Dès l'ouverture de L'Art d'Aimer nous est exposé le phénomène de la musique du cœur, celle qu'on entend lorsqu'on tombe amoureux. Plus tard, on découvrira que nos pulsions se libèrent dans le noir, à travers l'histoire d'une jeune femme qui avait arrêté de faire l'amour depuis un an. Autre cas d'école, cette femme mariée, fraîche quinquagénaire, qui se découvre un appétit de mangeuse d'hommes. Voici une blonde, mariée également, qui veut tout donner sauf son corps, et une brune qui veut bien donner son corps, par gentillesse, mais en avertissant son mari.
Emmanuel Mouret papillonne d'un personnage l'autre, comme au fil d'une nouvelle carte du Tendre. Si on ne pense qu'à « ça » dans L'Art d'Aimer, chaque scène est filmée avec l'élégance d'une miniature, d'une gravure ancienne. Et si on ne parle que de « ça », il apparaît que les liaisons sont ici finalement beaucoup plus chastes que dangereuses, la seule véritable étreinte pulsionnelle ayant lieu derrière une cloison (et dans le noir, forcément) et la seule incartade conjugale... en rêve. Le film croise folies du corps et sagesse de l'esprit comme folies de l'esprit et sagesse du corps, réussissant à être presque aussi puritain que libertin, ou l'inverse. Emmanuel Mouret, ses acteurs et surtout ses actrices, de Judith Godrèche à Ariane Ascaride, semblent avoir tourné L'Art d'Aimer avec, aux lèvres, un constant sourire. Discret, subtil. Et très communicatif."
Télérama


"Sois d'abord bien persuadé qu'il n'est point de femmes qu'on ne puisse vaincre, et tu seras vainqueur : tends seulement tes filets. Le printemps cessera d'entendre le chant des oiseaux, l'été celui de la cigale; le lièvre chassera devant lui le chien du Ménale, avant qu'une femme résiste aux tendres sollicitations d'un jeune amant. Celle que tu croiras peut-être ne pas vouloir se rendre le voudra secrètement. L'amour furtif n'a pas moins d'attraits pour les femmes que pour nous. L'homme sait mal déguiser, et la femme dissimule mieux ses désirs. Si les hommes s'entendaient pour ne plus faire les premières avances, bientôt nous verrions à nos pieds les femmes vaincues et suppliantes. Dans les molles prairies, la génisse mugit d'amour pour le taureau; la cavale hennit à l'approche de l'étalon. Chez nous, l'amour a plus de retenue, et la passion est moins furieuse. Le feu qui nous brûle ne s'écarte jamais des lois de la nature."

Ovide, L’Art d’aimer.

lundi 28 novembre 2011

*** "Longevity"

On a beau vouloir ne pas y attacher d'importance, ça fait plaisir quand on pense à vous ce jour-là, même si vous préférez désormais oublier le nombre... d'années vécues, qui vous ramènent obligatoirement à celles qui vous restent à vivre. Mais là, impossible de présager quoi que ce soit, sauf que la sortie sera sans issue de secours.


Shangli (Sichuan), Han Mansion, detail of a panel: "longevity"

Photo publiée avec l'accord du photographe, ce cher ami dont je peux dire :
"Il avait en lui de l’aristocrate, ce qui est proche de l’anarchiste. "
(G. K. Chesterton)
et qui écrivit un jour dans son journal ces quelques phrases qui relèveront le niveau de ma prose :

"L’idée d’avancer dans cet âge qui m’éloigne progressivement des autres, ne m’attriste pas. Avoir tous ces souvenirs des temps passés que toujours moins de gens connaissent, me donne le sentiment d’une richesse intransmissible. S’il faut toute une vie pour en comprendre le sens, je dois certainement me rapprocher du terme car je commence à y voir un peu plus clair. Mais je ne révélerai pas ce que j’ai compris : c’est incompréhensible à quelqu’un qui n’aurait pas atteint mon âge."

samedi 26 novembre 2011

De, l'ordinaire

Chaque jour les mêmes gestes, les mêmes instants, les mêmes vides, les mêmes silences, les mêmes radios, les mêmes occupations, ce quotidien fait de petites choses très ordinaires. En prenant mon petit café de onze heures, assise dans mon canapé, comme chaque matin le regard un peu vague vers la fenêtre, je me disais : si quelqu'un filmait ma vie (ce serait un film muet) que ressentirait le spectateur : Peur? Stupeur? Envie? Pitié? Tout cela sans doute... que je ressens moi-même.  J'étais là dans ces réflexions sur mon quotidien et l'ordinaire de ma vie, influencée par les émissions écoutées cette semaine dans les NCC, dont le thème était :
L'inquiétante étrangeté de l'ordinaire et plus précisément, dans la première émission, il était question du langage ordinaire.

"Comment expliquer le fait que les hommes soient d’abord séduits par ce qui sort du commun, le singulier, l’inattendu, l’extraordinaire. Ils rêvent de grandiose, de sublime, d’originalité. Ils admirent les supers héros, vénèrent les grands hommes, se cherchent un Dieu. Ce qu’ils nomment divertissement se résume bien souvent à une quête d’expériences qui les délivrent de leur condition d’ordinaire, d’être humain. Blaise Pascal voit dans le divertissement une façon de se détourner de la mort. Mais se divertir est aussi un moyen de donner un sens à l’existence, une raison de continuer jour après jour à faire quelque chose de sa vie. Or, si c’est cela qui est en jeu, si ce que cherche l’homme par-dessus tout, c’est d’accepter sa condition d’être humain, de se réconcilier avec l’existence au quotidien ; alors la meilleure voie à explorer n’est-elle pas, en lieu et place du fantasme de l’extraordinaire, la réconciliation avec l’ordinaire ?"

"L'ordinaire, ou cette partie de notre vie que nous connaissons si peu, cette dimension de nous-mêmes qui ne nous intéresse pas, or quand on s’y arrête, quand on prend le temps d’y réfléchir, on comprend que l’ordinaire est loin d’être connu et familier, précisément parce que l’on n’y pense pas, nous est inconnu, étranger, inquiétant même. »

Le texte ci-dessous, lu au cours de l'émission de lundi dernier, correspondait étrangement à mes interrogations, récurrentes :

"Il ne saurait y avoir rien de plus merveilleux que de voir un homme dans l’une quelconque de ses activités quotidiennes les plus simples lorsqu’il croit ne pas être observé.
Imaginons un théâtre : le rideau se lèverait et on verrait un homme, seul dans sa chambre, allant et venant, allumant une cigarette, s’asseyant etc. de telle sorte que nous verrions soudainement un homme, du dehors, comme nous ne pouvons jamais nous voir nous-mêmes. C’est à peu près comme si nous voyions de nos yeux un chapitre d’une biographie, cela devrait être à la fois effrayant et magnifique, plus magnifique que tout ce qu’un poète peut faire jouer ou faire dire sur la scène, c’est la vie même que nous verrions.
Mais c’est ce que nous voyons tous les jours et cela ne nous fait pas la moindre impression."


Photos du jour.


mercredi 23 novembre 2011

De quoi nourrir une certaine faim

Hier soir j'ai relu quelques pages des "Chroniques" de François Mitterrand dans La paille et le grain.
Au début de l'ouvrage il y a un Avertissement :

"Je n'ai pas l'intention d'écrire des "Mémoires" et je ne tiens pas un journal des événements que je vis ou approche. Mais je griffonne assez souvent des notes sous le coup d'une émotion ou par souci de fixer à leur date et dans leur contexte une impression, un fait, auxquels j'accorde une importance pour des raisons variables et qui restent subjectives. Ces notes attendent en vrac un sort incertain. Nombre d'entre elles demeureront inutilisées.[...]
Ce livre n'a d'autre plan que celui du hasard, et d'autre obligation que d'en traduire la nécessité. J'y pratique un genre hybride, ni exactement un journal ni précisément une chronique, bien que ces deux mots soient déjà venus sous ma plume [...].
J'ai choisi le titre "la paille et le grain" parce-qu'il résume assez bien ce que je pense de mon ouvrage. Je ne classe pas la paille parmi les matières viles tandis que le grain serait noble. A chacun son usage. Tout de même si au gré des pages le lecteur découvre, isole de quoi nourrir une certaine faim, qui est la mienne, d'aller plus loin que l'apparence, je me réjouirai de l'y avoir aidé."

C'est un livre que j'aime relire en piochant au hasard quelques pages. Celles-ci, lues hier soir :

Dimanche 17 octobre (1971)

Au spectacle de la nature il m'arrive souvent de vivre ces moments de bonheur où l'on s'arrête et dit : c'est le plus bel endroit du monde. La terre, notre amie, prodigue ses merveilles. Je la contemple depuis l'enfance sans épuiser jamais cette faculté d'étonnement qui naît de la beauté et qui donne l'obscure envie de remercier quelqu'un. C'est ce que je viens d'éprouver à Trébeurden, village breton, face à la mer. En vérité, il s'est passé bien peu de choses à raconter. Des hauteurs de Bihit j'ai regardé la courbe des rivages, le jeu des îles et des eaux, la suite des heures dans le ciel. Au soleil couchant j'ai marché jusqu'au petit détroit qui sépare le continent de l'île Milhaud. Chaque pas changeait l'horizon. Tantôt apparaissait le port pêcheur, ses voiles droites et ses barques à sec, tantôt le chemin s'ouvrait sur la pointe, qui offrait à ma vue son insolite architecture de granit éclaté, avec, tout autour, l'océan. Je me suis assis en attendant la nuit, respirant comme on boit l'odeur d'iode et de varech, écoutant la marée revenir au trot. Une lumière d'équinoxe comme seule la Bretagne sait l'inventer, dans la foulée des ses tempêtes, éclairait le paysage de Beg An Fry à Ploumanach. Elle était d'une telle netteté que je distinguais à une lieue la faille des estuaires. J'abandonnais aux éléments le mouvement de mes pensée. Près de moi un cormoran dormait sur le rocher rose. Le vent lui levait l'aile.

C'est magnifique. Je voudrais en prendre de "la graine"...



mardi 22 novembre 2011

Une femme libre, rebelle

Danielle Mitterrand (1924-2011) est morte.
Tout est, a été, sera dit sur sa personnalité.
Elle m'évoque ces souvenirs...


Nous nous croisions dans ce parc, en 1986.  Elle était avec sa soeur, Christine Gouze-Rénal. Je séjournais dans le même hôtel, seule, tu étais mort quelques mois plus tôt.
J'y ai fait un passage éclair cette année, fin mai, le temps d'un thé et d'une promenade : "luxe, calme et volupté"! Désormais au-dessus de mes moyens cet endroit; mais ces "vocables" je peux les ressentir ailleurs, plus modestement, avec autant d'intensité.


Mes souvenirs, avec toi, étaient vivaces.

lundi 21 novembre 2011

Un dimanche (pas vraiment) ordinaire

Hier, me prit l'envie d'aller au cinéma mais je trouvais qu'il faisait trop beau pour aller m'enfermer dans une salle.
En arrivant sur la corniche de la plage de cette station balnéaire, j'ai su que j'avais bien fait de venir. L'odeur de la mer, le ciel, le soleil, et tout et tout, tout m'enveloppait de bien-être. Je me baladais en respirant à fond cet air iodé. J'étais seule et je prenais des photos; je pourrais me contenter de regarder le paysage, non, il faut que je mitraille. Et dire que ce matin sur France Inter on annonçait des averses en Bretagne. N'importe quoi, comme d'habitude.





Arrivée au bout de la corniche, j'aperçois un cinéma et l'affiche du film : Intouchables. Je me laisse tenter, 7 300 000 entrées, je me méfie des gros succès (cf. Bienvenue chez les Ch'tis que je n'avais pas pu regarder jusqu'à la fin à la télévision), mais j'aime bien François Cluset.  Film à 16 h 15, j'ai trois quart d'heure d'avance. Je prends mon billet et je rentre au casino prendre un café, il n'y avait pas d'autre bistrot dans le coin. Des années que je n'y avais pas mis les pieds. Je présente ma carte d'idendité, elle me donne le plan pour aller jusqu'au bar (0_0). Je traverse une immense salle remplie de machines à sous, qu'on appelle aussi je crois des Bandits manchots; devant chaque machine, des hommes, des femmes, plus nombreuses, de tous âges et même très âgées et qui, j'imagine, doivent passer des heures devant ces "bandits" (voleurs) en espérant faire tomber le gros lot! Tristounet de voir ça. Au bar, je m'enfonce dans un fauteuil confortable, il n'y a personne, ils sont tous à faire cliqueter les pièces. Des écrans vidéos passent en boucle des clips de Madonna. Je ris, qu'est-ce que je fais là dans cette ambiance assez glauque? Je bois un excellent café avant d'aller au cinéma!
15 h 50, il est temps que j'y aille. Une queue immense sur le trottoir. Je demande au "préposé" qui ouvre le passage si je peux aller dans la salle puisque j'ai mon billet; il me laisse passer. Quelle bonne idée de l'avoir pris à l'avance, je n'aurais pas eu le courage de faire la queue.

Je n'ai pas regretté ces deux heures. Non ce n'est pas un chef-d'oeuvre, beaucoup de clichés tout de même, des bons sentiments mais de temps en temps j'aime ne pas me prendre la tête et là j'étais dans un fauteuil quasi ergonomique et j'ai passé un agréable moment.

Le plus beau (moment) fut cette lumière éblouissante en sortant de la salle : ces photos ne peuvent décrire ce que j'ai ressenti devant la baie; il était 18 h 15, la nuit était tombée, pas un souffle de vent et l'air était d'une douceur inouïe. En contemplant ce paysage, je pensais à Edward Hopper - pourquoi  lui? Peut-être pour cela*  - . Non je n'étais pas sur la Côte d'Azur, j'étais bien en Bretagne, à Bénodet, le 20 novembre 2011!

* "... il peint la banalité d’un monde débarrassé du superflu et de l’édifiant, quand seuls subsistent le silence d’un corps et la nudité d’une architecture, quand le temps semble s’être arrêté, à moins qu’il ne continue de passer indéfiniment, avec cette sourde mélancolie qui caractérise les dimanches."




samedi 19 novembre 2011

Journal

Lundi, mardi, mercredi.
Je ne sais plus. Rien de marquant.

Jeudi.
Matin. "Mon  coeur scintille". Mais non! Ce n'est pas encore mon anniversaire. Fi de la date. Joie.
Écouté l'après-midi Question d'éthique. Invité : un écrivain, Pierre Pachet, interrogé sur son livre, Sans amour.


"Les dames âgées ne sont pas nées telles. Elles furent des jeunes filles, qui attiraient le regard des hommes et le regard en général.


Pour les regarder comme elles le méritent, je dois opérer une conversion de mon regard : le forcer à cesser de se tourner vers ces jeunesses attirantes, pleines de vie et de charme, dont le sourire heureux, conquérant, ravageur, s'atténuera puis s'effacera avec l'âge, sans qu'elles perdent pour autant leur beauté ou leur attrait...


À travers des personnages de femmes qu'il a connues, Pierre Pachet s'interroge sur le renoncement à l'amour, sur le choix de la solitude, quand viennent l'âge, la mort ou l'abandon d'un compagnon. Sur le mystérieux - pour lui - désir de paix des femmes."

4è de couverture.

Tout était juste, beau, vrai dans ce qu'en disait l'auteur mais d'une tristesse infinie. Juste envie de me noyer dans la rivière après avoir écouté l'émission. Quelques notes sur le sujet :

. Vieillir c'est "un rétrécissement des possibles, on a tendance à s'y laisser aller".
. Passé un certain âge les femmes disent : " je voudrais enfin en finir avec les tourments de l'amour. Être enfin débarrassée de l'intrusion masculine".
(Je dis : Je voudrai NE JAMAIS en finir avec les tourments de l'amour).
. Vieillir c'est renoncer à plaire dans sa relation à autrui, ne plus attacher d'importance à sa façon de s'habiller etc."
(Je dis : quelle tristesse).
. Vieillir c'est" faire accepter à l'autre ce que l'on est devenu".
(Oui, OK. Hum!) "Préparer autrui à être capable de recevoir ce que l'on peut lui donner".
(Oui OK, et c'est pas un cadeau).
Ce dont a le mieux parlé Pierre Pachet dans cet entretien c'est de la solitude et aussi du corps et de la chair :
. "Le corps intouché. La chasteté subie. Ce à quoi on ne supplée pas en s'enveloppant soi-même."
(C'est peut-être pour cela que l'on voit tant de personnes âgées dans les centres de thalassothérapie. Elle y vont pour se faire masser, caresser par les bains bouillonnants, les enveloppements aux algues, sentir qu'elles ont un corps etc.).

Après l'avoir entendu, je me suis dit que je ne devais pas être encore une vieille femme. A quel âge renonce-t-on à l'amour? A quel âge les sens s'éteignent? Simone de Beauvoir en a parlé quand elle avait soixante dix ans.

Vendredi.
Shopping avec mon Bezo, pour lui faire plaisir, parce qu'elle va mal. Elle m'a emmenée dans des boutiques où je n'aurais jamais idée de mettre les pieds. Nous sommes soeurs et pourtant si différentes. Mais elle était si triste l'autre soir au restaurant en mangeant son couscous, son regard si lointain, si désespéré, que je rentrerais avec elle dans n'importe quelle boutique,  pour voir un peu de joie dans ses yeux.


Après le shopping - en fait nous n'avons rien acheté - nous sommes allées chez Philomène prendre le thé. Nous n'avons pas pris de macarons (la spécialité de la maison) mais des polonaises (brioche, crème pâtissière, rhum ou grand marnier, enveloppée de meringue. Presque pas calorique)! En souvenir de notre mère qui en raffolait. Je n'en avais pas mangé depuis au moins trente ans. Elles étaient délicieuses. Et mon Bezo qui est affreusement gourmande avait retrouvé le sourire.

Samedi.
Ecouté ce matin Répliques. Alain Finkelkraut recevait Renaud Camus, à eux deux ils faisaient la paire. Bon, j'aime cette émission, mais ce matin le ton était trop emphatique. Alain Finkielkraut et sa moraline était à son comble. Il ferait bien de prendre à son compte ce qu'il dénonce chez les jeunes : leur manque de savoir-vivre! L'autre jour dans La Grande Librairie, pendant que J.M.G. Le Clézio était interrogé par François Busnel, Monsieur Finkielkraut se retenait à peine de bailler, prenait sa tête dans ses mains et regardait sa montre, impatient de prendre lui-même la parole pour parler de son livre. Quel manque d'élégance!

Ce soir, vu un film suisse : 1 journée de Jacob Berger.
Beaucoup aimé.

vendredi 18 novembre 2011

Jacques Gamblin

Pour les parisiens qui n'auraient pas vu ce "Clown aérien" dans :
Tout est normal mon coeur scintille, courez-y!
Jusqu'au 3 décembre au Théâtre du Rond-Point.

Chanceux ces parisiens! Cerise sur le gâteau :
Jacques Gamblin fera une lecture de La nuit sera calme de Romain Gary au
CentQuatre du 9 au 17 décembre!

mercredi 16 novembre 2011

Chaude ou froide, que la lumière soit

Ma vitrine préférée, énième!
Incroyable ce changement d'éclairage selon l'endroit d'où est prise la photo : couleurs chaudes ou couleurs froides. J'imaginais un soleil couchant chez les Inuites (de luxe) puis une nuit éclairée par la lune.






Noël n'est que dans six semaines, rien ne nous sera épargné, pour ne pas l'occulter. Et, toutes les vitrines n'ont malheureusement pas cette simplicité esthétique. Je me demande d'ailleurs si la vitrine était terminée ou en cours de réalisation. A revoir...

Celle-ci, du même magasin, avec de très beaux santons...


Je ne sais pas si c'est de voir ces vitrines qui m'a rendu mélancolique en rentrant, je déteste cette période à venir; il en faut peu en ce moment pour que je m'y vautre, dans la mélancolie. C'est sans doute pour cela que je m'exprime avec tant de légèreté, de futilité, ici ou là...
Mais la vie est belle nom d'une pipe. Secoue-toi! Vite, reprends ton heureuse lecture :

"Ce soir, un chat a poussé la fenêtre tandis que j'écrivais, et tout à coup ses yeux ont été devant les miens. J'avais eu peur. Nous nous sommes regardés un moment, très silencieux, très fixes. Esprit bon ou esprit mauvais?... J'hésitais entre l'envie de l'appeler sur moi et celle... Finalement, tandis que nous étions perdus dans une contemplation mutuelle, j'ai fait : Psshh!... Et il a détalé.
Je reste confondu par l'intensité du plaisir que j'ai trouvé, pendant quelques minutes, dans les yeux de ce chat. Je pense toutefois qu'on peut comprendre que les hommes trouvent plaisir à regarder les chats, mais quel plaisir les chats trouvent-ils à regarder les hommes?... Plus j'y songe, moins je puis imaginer que celui-ci soit venu sans intention. A elle seule, la manière décidée dont il a poussé la croisée, dont il s'est introduit dans ma chambre, aurait dû m'avertir : il avait l'allure, la démarche des êtres qui accomplissent une mission. Ce regard, je l'ai déjà rencontré ailleurs, c'est la seconde fois qu'il m'atteint. Je revois maintenant cette grande salle d'auberge, toute vide, dont nous savourions la fraîcheur après des heures de marche sur la route ensoleillée, et où nous écoutions le bruit régulier de l'horloge au balancier de cuivre. Un chien, un grand berger allemand, poussa la porte, sans bruit, s'avança vers nous, avec cette absence d'hésitation si étonnante chez un animal et, s'asseyant devant elle, devant l'Amie, de l'autre côté de la table, à distance, se mit à la regarder patiemment, en plein visage, comme s'il la connaissait, ou comme s'il voulait l'avertir de quelque chose... Il n'avait eu ni un jappement, ni un aboiement; pas un son ne sortait de sa gorge, et une telle gravité dans l'attitude nous en avait tout de suite imposé. Au bout d'un long moment, il partit comme était venu... Nous dûmes attendre longtemps encore avant de pouvoir toucher nos verres.
Je connais beaucoup d'imbéciles qui riraient s'ils lisaient ceci."

Paul Gadenne, in La rue Profonde, éditions Le Dilettante, 1995.

Je remercie vivement l'ami qui m'a parlé de cet écrivain et donné envie de le lire.

mardi 15 novembre 2011

Coïncidences

Il y a d'étranges coïncidences.
Je me promenais vendredi dernier, 11 novembre et, passant sous ce pont



je m'arrêtais pour contempler ces graffitis

EXIT


Ils me parlaient terriblement. La veille je venais de remplir ma "déclaration anticipée"; j'espère toujours de toutes mes forces n'avoir pas besoin d'aller en Belgique ou en Suisse si un jour j'étais condamnée à vivre comme un légume et, que les instances françaises prendront enfin - dans un proche avenir - les dispositions pour légaliser ce qui se fait dans ces pays.
Un sujet qui me tient à coeur.




 EXIT ADMD dans le monde.

dimanche 13 novembre 2011

Sèche linge iodé

Photos du jour. Ça décoiffe!




Sûr, le linge ne doit pas sentir le renfermé. Ce doit être assez "coton" de l'étendre sur le fil; ne pas lésiner sur les pinces à linge! Pas besoin de repassage! C'est une tradition à l'Ile Tudy de faire sécher le linge ainsi, en front de mer et tant pis pour le paysage un peu défiguré tout de même.

samedi 12 novembre 2011

Le délicieux non-amour

Je conservais dans une grande enveloppe ce qu’il m’envoyait par la poste. Oh! ce n’était pas grand-chose, enfin rien de grande valeur, mais pour moi c’était comme des petits morceaux de lui dont il se séparait pour me les offrir. Comme ça, sans rien attendre en retour. D’ailleurs je ne connaissais même pas son adresse.
Nous correspondions par mail, nous plaisantions beaucoup, je ne lui cachais pas grand-chose de ma vie et il ne me disait pas grand-chose de la sienne. Je prenais ce qu’il me donnait : du rire, de la légèreté, de la philosophie, de l’esthétisme, une présence virtuelle, rituelle, spirituelle. Tout cela était très… fraternel, reposant car si éloigné de l’amour, enfin, disons que j’ai mis un peu de temps à comprendre qu’il ne s’agirait jamais d’amour entre nous. Il avait déjà une bien-aimée dont il me parlait beaucoup et j’aimais qu’il m’en parlât. C’est assez délicieux le non-amour. Nous savions désormais que jamais nous ne nous rencontrerions, qu’un jour très certainement, lassés des échanges virtuels, nous nous perdrions de vue si j’ose dire. Nous vivions à des milliers de kilomètres l’un de l’autre….
Il peignait dessinait parfois et, s’il ne vivait pas de son art, ce n’en était pas moins un artiste. Je découvris un jour une photo d’une de ses œuvres, que j’aimais d’emblée. Je lui demandai s’il pouvait m’envoyer la photo en plus haute résolution, je voulais la faire agrandir et encadrer. Il me répondit laconiquement : je vais voir si je la retrouve dans mes cartons. Je lui répondis aussitôt que je voulais une photo, pas qu’il se séparât de l’original, surtout pas.
Le temps passa, nous poursuivions nos échanges, je pourrais même dire nos enfantillages, cimentés tout de même parfois, de littérature, d’interrogations, de philosophie.
Puis un matin, je trouvai dans ma boîte aux lettres (moi je ne suis pas sur une liste rouge) une très grande enveloppe, un peu mal en point. Je reconnus les timbres. Je remontai l’escalier rapidement, refermai ma porte et ouvris l’enveloppe avec précaution, j’avais le pressentiment de ce qu’elle contenait. J’éclatai de rire en voyant l’emballage : ah ! c’est vraiment un artiste me dis-je ! Oh joie, c’était la peinture dont je voulais la photo. Il m’avait offert l’original, son original. Unique exemplaire avec sa signature et l'année de sa réalisation.
Tu le sais bien toi mon Amour ce que ça vaut un original d’artiste, inconnu ou pas.
Ce que j’avais sous les yeux était encore plus beau que la peinture en photo. Je ne pus que lui dire merci.
Je l’apportai rapidement chez mon encadreur.

Il a réussi à le retendre, on ne voit plus les « souffrances » du voyage postal. Il est maintenant sur mon mur… pour toujours. Les tons : ambre et gris ou or et argent, c’est selon la lumière qui rentre dans la pièce.
Il se passe parfois des choses merveilleuses par Internet.

mercredi 9 novembre 2011

Et je baisai toutes ces épaules


« Mes yeux furent tout à coup frappés par de blanches épaules rebondies, sur lesquelles j’aurais voulu pouvoir me rouler. Des épaules, légèrement rosées, qui semblaient rougir comme si elles se trouvaient nues pour la première fois ; de pudiques épaules qui avaient une âme et dont la peau satinée éclatait à la lumière comme un tissu de soie. Ces épaule étaient partagées par une raie, au long de laquelle coula mon regard, plus hardi que ma main. Je me haussai tout palpitant pour voir le corsage et fus complètement fasciné par une gorge chastement couverte d’une gaze, mais dont les lobes azurés et d’une rondeur parfaite étaient douillettement couchés dans des flots de dentelle. Les plus légers détails de cette tête furent des amorces qui réveillèrent en moi des jouissances infinies, le brillant des cheveux lissés au-dessus d’un cou velouté comme celui d’une petite fille, les lignes blanches que le peigne y avait dessinées et où mon imagination courut comme en de frais sentiers, tout, me fit perdre l’esprit.
Après m’être assuré que personne ne me voyait, je me plongeai dans ce dos comme un enfant qui se jette dans le sein de sa mère et je baisai toutes ces épaules en y roulant ma tête. »

Honoré de Balzac, in Le Lys dans la vallée.

Texte lu par Jean-Louis Jacopin que l’on peut réécouter ici.

« Comme autrefois vous allez me rendre à la santé, Félix, et ma vallée me sera bienfaisante. Ils croient que ma plus vive douleur est la soif. Oh ! oui, j'ai bien soif, mon ami. L'eau de l'Indre me fait bien mal à voir, mais mon coeur éprouve une plus ardente soif. J'avais soif de toi, me dit-elle d'une voix plus étouffée en me prenant les mains dans ses mains brûlantes et m'attirant à elle pour me jeter ces paroles à l'oreille : mon agonie a été de ne pas te voir ! »

« La bataille inconnue qui se livre, dans une vallée de l'Indre, entre Mme de Mortsauf et la passion, est peut-être aussi grande que la plus grande des batailles connues.»
(H. de Balzac).

J’ai succombé ce matin au plaisir d’entendre ces mots voluptueux.

« Les femmes les plus vertueuses ont en elles quelque chose qui n’est jamais chaste »
Honoré de Balzac.

« L’écriture du Lys dans la vallée s’est échelonnée sur plusieurs années. Dans une première ébauche, que l’auteur abandonnera momentanément, Blanche de Mortsauf, (surnommée Henriette par Félix de Vandenesse) apparaît sous les traits de Mina, femme dévouée à la souffrance en 1823. C’est ce portrait-là qu’il a développé et enrichi après avoir lu Volupté* de Sainte-Beuve, ce qui excita la hargne du critique littéraire qui savait son roman imparfait. Le Lys dans la vallée se présentait comme une réplique de Volupté, en mieux.
Balzac ne se priva pas d’attaques contre le roman de Sainte-Beuve (parfois injustes comme l’indique Maurois), car même imparfait, et reconnu ennuyeux par de nombreux lecteurs actuels, Volupté fournit le cœur du Lys dans la vallée, roman d’éducation sentimentale qui devint un mythe littéraire et que d’autres écrivains se sont réappropriés : Gustave Flaubert pour l'Éducation sentimentale, Marcel Proust, et André Gide avec la Porte étroite. »
(Source Wikipédia).

* Je m'y replonge de temps en temps : deux tiers d'ennui, un tiers de volupté, c'est déjà beaucoup.

lundi 7 novembre 2011

***

10 h.
Fenêtres fermées (double vitrage), radio éteinte, plus un bruit.  Assise face à la fenêtre, combien de temps puis-je tenir sans bouger, sans radio, sans musique? Ne pas fermer les yeux, voir la vérité en face. La dure vérité.

Dans le silence j'atteins la vérité.

J'ai tenu dix minutes : c'était insoutenable.

dimanche 6 novembre 2011

De Marilou à Alice au pays des merveilles

Vendredi soir, théâtre.

L’Homme à (la) tête de chou.
Chorégraphie de Jean-Claude Gallotta.

"Dans la lumière d'une nuit de lune narquoise, forcément bleu pétrole, l'Homme à la tête de chou ne raconte pas seulement la vie tumultueuse de la petite garce Marilou, insaisissable shampouineuse qu'un homme "aveuglé par sa beauté païenne" fera disparaître sous la mousse".
Sur la musique, les paroles de Serge Gainsbourg, la voix de Alain Bashung, les danseurs occupent l’espace dans des courses frénétiques, bougeant leur corps au rythme sensuel – sexuel - des mots et de la musique.
Un très beau spectacle qui a dû réveiller les spectateurs qui étaient derrière moi. En s’installant dans leur fauteuil, j’entendais une femme dire à son ami : « je serais bien restée à la maison ce soir, j’étais douillettement installée… , aucune envie de ressortir. » Et l’ami de renchérir : « moi, pareil. ». J’aurai pu rajouter : moi itou !
J’avais craint d’être un peu déçue, les protagonistes étant absents, mais pas du tout. Leur présence était réelle. Certains tableaux sont violents, d'autres érotiques, j'ai trouvé ce spectacle à la hauteur des deux poètes.

Alain Bashung avait assisté aux répétitions; il devait être sur scène lorsque le projet s'est concrétisé.

"Il est 15 heures. Dans le beau studio qui ouvre sur les montagnes du Vercors, Mathilde Altaraz, la femme et l'assistante de Jean-Claude Gallotta, opère les dernières mises au point : rebonds, chaloupés et lancers des bras. Des "duos bien lents, bien doux, bien suaves", du "ciselé", du "balancé", du "pulsé", demande-t-elle, un papier à la main telle une liste de courses. Problème : comment faire valser les hommes à la façon de cette petite garce de Marilou ? En les tenant par la braguette*, bien sûr ! L'exercice provoque quelques fous rires. Après tout, L'Homme à tête de chou n'est pas une histoire d'enfants de choeur. Juste une histoire d'amour, de jalousie et de mort."
La suite ici.
* Sans aucune pudibonderie, ce n'est pas ce que j'ai préféré de la mise en scène; ça manquait de volupté, mais bon, on était dans du hard. Je le préfère ici.

Je me souviens de ce disque vinyl que tu écoutais si souvent avec une espèce de dévotion, celle que tu avais pour Gainsbourg et que tu m’avais transmise.

Samedi.

Une semaine sans taper dans la balle ! J’étais en manque et ce sont des fairways bien mouillés que j’ai parcourus hier midi. Ma balle a eu la bonne idée d’atterrir au pied d’un arbre et de me faire découvrir ces petites merveilles. Très étrange le petit champignon qui ressemblait  à une balle de golf, à côté de la mienne ! Quel bonheur d’être là à l’heure du déjeuner. Pas un joueur, le silence, l’air, les odeurs (les avant-greens ont été tondus), le soleil, le vent, tout, tout cela me procurait un bien-être proche… du bonheur ?




Il semblerait que ce soient des Amanita muscaria.
Dieu merci, je n'ai pas rencontré de Phallus impudicus dit Satyre puant (0_0)

Quand le terme détritus est utilisé dans les Règles de golf, il peut désigner :
A) le givre
B) un ver
C) une feuille morte
D) la neige
E) du sable sur l'avant green
F) un brin d’herbe adhérant à la balle
G) une crotte de chien
H) une feuille de papier abandonnée sur le sol
I) un brin d’herbe coupé
J) du sable sur le green
K) un mégot de cigarette
L) un champignon qui pousse sur le green
M) un arbre venant de tomber naturellement, totalement déraciné, en travers du fairway
Réponse : B, C, D, G, I, J, M

En compétition, j'aurai donc dû jouer ma balle sans la déplacer. Mais là, j'ai laissé le drôle de champignon pousser tranquillement et j'ai déplacé ma balle. Je n'ai d'ailleurs pas trouvé le nom de celui-ci.

Dimanche.

Rebelote, sur les greens à la même heure. Moins de vent, plus de soleil. Toujours pas de joueurs sauf le pro avec des bambins qui s’initient au swing. Avec une souplesse inouïe, ces enfants tapent dans la balle d’un geste tonique et gracieux. Pivot, backswing, finish, tout est déjà presque parfait. Bon c’est pas tout ça mais j’aimerais que le pro me laisse le passage là ! Ça y est, il m’a vue et me fait signe de jouer. Garez-vous les mômes, il m’arrive aussi de ne pas viser droit. Youpi ! Joli coup (on ne m'appelle pas Modeste), ouf, c’eût été vexant de rater ce départ. Quelques trous plus loin je passe devant les champignons d’hier. Tiens, quelques transformations en une nuit. Celui-ci  s'est fendu, aplati, le chapeau est moins bombé...


… et ceux-là ont sorti la tête des feuilles. Je remarque qu’ils ont  encore une peau de bébé, les excroissances viendront plus tard ; on dirait des tomates.



Clic clac, je remballe mon appareil et j’attaque les deux derniers trous. Il est temps, mon sac commence à me peser sur l’épaule, j’ai faim, il est deux heures. J'ai très mal joué mais les enfants ne m'ont pas vu jouer comme un pied... de champignon, heureusement! J'ai pris l'air et fait une belle balade. Je repensais à Marilou, à Lewis Carroll, à Alice au pays des merveilles... Dans ma voiture j'ai allumé la radio, j'avais raté mon émission du dimanche : Des Papous dans la tête...

Les années se suivent et

vendredi 4 novembre 2011

François Matton énième

En voilà un (de blog) qui ne me "dégoûtera" jamais!
En revanche, je me dégoûte un peu, là.

Réconciliation

Impossible de rester dans le chagrin avec ce paysage. Oui, toujours le même, chaque semaine et pourtant si changeant. Je ne sais plus si ce sont les bains dans la piscine d'eau de mer de la thalasso ou la vue de ce ciel et le bruit des vagues qui me remettent en forme. Je sais cependant que mon plaisir le plus intense est dans la contemplation.
Cette vue me réconcilie à la vie.




J'ai vu apparaître cet arc-en-ciel...

... alors que j'avais cette brosse sous les yeux!

Je me suis dit qu'il était temps que je sorte ma tête de loup du placard pour enlever la poussière au plafond de mon appartement (0_0)


Le vent m'empêchait de tenir fermement mon appareil.
Dommage, les images sont très instables.

jeudi 3 novembre 2011

Journal

Mercredi 2 novembre.

Rien. Tuer le temps. Médiathèque l'après-midi. Agacement d'être obligée d'être accroupie pour trouver les ouvrages qui m'intéressent. Pourquoi ces auteurs sont justement sur l'étagère qui est au ras du sol! Je m'assois par terre et je bouche le passage. M'en fiche. Ça ne devrait pas exister les étagères au ras du sol!
Emprunté deux livres : La rue profonde de Paul Gadenne et L'écriture même : à propos de Barthes de Susan Sontag. Pas trouvé L'Empire des Signes de Barthes que j'ai envie de lire. Il existe dans la collection "Points", je pourrais l'acheter.

Regardé le soir soir un film de Wong Kar-Waï : Happy Together. Un film noir, désespéré avec des images sublimes.

Me suis couchée.  J'ai commencé le petit livre (60 pages) de Sontag sur Barthes.
"Il se donnait toujours à fond à ce qu'il écrivait; il était toujours concentré, ardent, infatigable. Cette étourdissante inventivité ne semble pas être un simple attribut des extraordinaires pouvoirs de Barthes, en tant qu'intellectuel et en tant qu'écrivain. Il semble presque avoir valeur de parti pris, - comme s'il s'agissait d'un impératif du discours critique. "La littérature est comme le phosphore", écrit-il dans son premier livre, le Degré zéro de l'écriture, publié en 1953; "elle brille le plus au moment où elle tente de mourir"."

La couverture représente MU, le vide
(Roland Barthes, l'Empire des Signes)


J'ai éteint la lumière, j'ai essayé de faire le vide, j'ai fait le plein de larmes. Sans raison ou, pour trop de raisons.
Nuit tourmentée.

Donc le Goncourt a été attribué à Alexis Jenni pour l'Art français de la Guerre.
Le Renaudot à Emmanuel Carrère pour Limonov.

mardi 1 novembre 2011

Louis Calaferte

"Mystique, anarchique,
Calaferte se voulut d'abord un homme debout"

Je viens de terminer Choses dites, un livre d’entretiens et de choix de textes de, et avec Louis Calaferte.
Comme beaucoup de lecteurs, j’ai découvert – je devrais dire, un ami** m’a fait découvrir (et bien d’autres auteurs : Marcel Moreau, Joë Bousquet, Pierre Michon, Paul Gadenne, André Velter,  la suite serait trop longue) – cet écrivain avec Septentrion. Couverture de l’ouvrage, collection Folio, dans le bandeau de mon blog, à droite : un visage de femme : une peinture de Louis Calaferte. Et quelle découverte ! Bien sûr, j’ai ensuite poursuivi avec son premier récit : Le requiem des innocents qui m'avait moins emballée, puis d’autres ouvrages, achetés ou empruntés à la médiathèque.
« On n’a jamais, je dis bien jamais, écrit quelque chose d’aussi fort, d’aussi cru et violent. Et drôle. Et horrible. Et peut-être prophétique (…) Ne pas avoir lu ou ne pas lire sur-le-champ Septentrion est foncièrement immoral. »
Philippe Sollers (Le Nouvel Observateur).

Mise en garde : le lire avant de l’offrir, pour ne pas commettre d’impair. On ne ressort pas indemne de sa lecture.

Celui que je viens de terminer donc, Choses dites, ce sont des Entretiens qui avaient été diffusés par France Culture, en 1988.
« Les relisant aujourd’hui, il me semble qu’ils n’ont rien perdu de leur vivacité. Puissent-ils, à l’instar des textes qui complètent ce volume, inciter des lecteurs à aller au plus près d’un monde où même l’amour a « la saveur du terrible ».
« Le franchissement de la ligne. » Louis Calaferte nommait ainsi cet instant où l’homme abdique et entre en agonie. La création fut le barrage qu’il établit face à la maladie. Écrire, peindre, aimer, en une tempête chaque aube éveillée, pour ne pas se laisser surprendre. Telle fut la leçon de vie de ce « mortimiste ».
Pierre Drachline.

Les Entretiens ont été restitués dans l'ouvrage sans la moindre réécriture, tels qu'ils ont été dits sur France Culture. Extraits :

P.D.- Vous avez commencé quand l’écriture de Septentrion ?

L.C.- J’ai mis cinq ans à l’écrire. Je l’ai publié… je ne sais plus… Il y avait déjà un an qu’il était fini.

P.D.- En 1963. C’est un livre qui est mal parti, un livre qui a une légende. Un des rares livres de la littérature contemporaine que les gens se signalent comme en secret. On se le passe un peu, mais on le prête difficilement, de peur de ne pas le voir revenir. Et c’est un livre qui commence par une phrase superbe, « Au commencement était le sexe ». Alors, référence à la Bible ?

L.C.- Bien sûr. Bien sûr. Forcément, oui. Il y a une espèce de dénaturation, là.

[…]

P.D.- Il y a dans Septentrion un passage superbe sur la lecture – qui a d’ailleurs été repris en affiche par les éditions Denoël – sur la nécessité de lire.

L.C.- Sur la nécessité absolue de lire. Parce que… la connaissance c’est la vie. Point. Terminé. C’est tout. Si on n’a pas ça dans la tête, on est foutu. D’une manière comme de l’autre, on est foutu. Et ça c’est une choses que personne n’enseigne… Parce que moins il y a de connaissance, plus on peut vous étouffer. Non, non, la connaissance, c’est la vie. Donc, il faut lire. La connaissance s’acquiert. En fait, qu’on le veuille ou non, jusqu’à maintenant il n’y a quand même qu’un moyen, c’est quand même le livre. Le reste… l’image… moi, je veux bien, mais enfin… l’image, ça passe.

[…]

P.D.- Ce rapport à la femme ? Ce mélange de fascination et de répulsion dans Septentrion

L.C.- Ah ! Nous y voilà.

[…]

P.D.- Il y a quelques très beaux portraits de femmes dans Septentrion.

L.C.- Oui… très beaux ?... enfin… il y a un portrait de femme.

[…]

P.D.- Ça ne vous a pas trop énervé les comparaisons qui ont été faites avec Henry Miller ?

L.C.- Pas du tout. Pas du tout. J’avais une très grande admiration – que j’ai toujours – pour Miller.

P.D.- Vos œuvres respectives n’ont pourtant pas grand-chose à voir.

L.C.- Non. Oh ! mais, moi, on m’a comparé à tout le monde. On m’a comparé à Céline. Un jour, j’avais fait la liste. C’est effrayant. Kafka. Céline. Miller… je ne sais plus. Qui encore ? Enfin, il y en avait des paquets, des tonnes. C’est le besoin de comparaison. Quoi qu’il en soit, l’univers de Miller n’est pas le mien. Cela dit, moi, j’aime beaucoup Miller.

P.D.- Dans Septentrion et ça, on ne l’a pas assez souligné – on a préféré s’arrêter souvent aux anecdotes -, il y a un travail, avant tout, sur la langue, qui est fantastique.

L.C.- Merci de le dire !...

=0=0=0=0=

P.D.- Aujourd’hui, un écrivain qui a quelques milliers de vrais lecteurs, c’est fantastique.

L.C.- Ah ! bon. Alors, c’est fantastique. Alors, j’ai quelques milliers de vrais lecteurs. Je suis content de les avoir. Je ne les connais pas, eux non plus d’ailleurs, ils m’écrivent de temps en temps, je réponds un petit peu et puis après je ne réponds plus, parce que, sinon, ça n’a pas de fin. Ça me fait plaisir, je suis content, mais ce n’est pas mon objet. Vous savez bien que je suis loin de tout ça. Pourtant très longtemps – une fois encore, je ne raconte pas d’histoires – j’ai envisagé de ne pas publier. Vraiment. Ça ne m’aurait pas gêné du tout.

P.D.- Qu’est-ce qui vous a amené à cette position ?

L.C.- Rien, mais…

P.D.- Un dégoût ?

L.C.- Oui… voir toute cette…

P.D.- Une fatigue ?

L.C.- Voir cette vanité… toute cette agitation autour de ça… Je ne sais pas, moi, le menuisier qui fabrique une table, il ne fait pas tant d’histoires. Il fait sa table, elle tient debout, il a mis ses quatre pieds. Moi, je fais des livres et, en général, ils tiennent debout, ils ont leurs quatre pieds. Je suis prêt à l’anonymat, qu’on ne mette pas mon nom sur les couvertures, dans les journaux. Je m’en fous ! Ça ne me gêne pas. Je m’en fous ! Au contraire, même, je souhaiterais que l’art soit complètement anonyme. Ça se faisait, vous savez… les ateliers… Leonardo da Vinci… A cette époque-là… C’est le XIXe qui a amené tout ça… cette personnalisation… Un peu plus tard, la vedette… C’est complètement tordu, ça. Qu’on ne mette plus aucun nom sur les livres ! Vous allez voir, il va se faire un vide dans la littérature ! Putain ! Mais personne ne va plus vouloir écrire. On va être trois à rester, vous allez voir ! Ils ne veulent pas faire de l’art, ils veulent leur nom ! Ils veulent qu’on voie leurs têtes ! C’est ça, la vérité. C’est là où ça pourrit tout ! Bon… et puis, je ne sais pas pourquoi je m’emballe…

P.D.- A défaut d’être quelqu’un, ils veulent être quelque chose.

L.C.- Oui… ils veulent être… Rien… Ils veulent être… mais vous le savez bien, vous essayez de me faire parler. (Rires) Vous la savez bien, ils veulent être à la télévision… pour qu’on les voie. Pauvres mecs ! c’est lamentable. Absolument lamentable. Je vous le dis, qu’on ne mette pas de nom sur les livres ! Anonymes. Anonymes. Vous verrez ! Pivot n’a plus personne. Réglé !

Louis Calaferte, in Choses dites. Entretiens et choix de textes, éditions Le cherche midi, 1997.


** Je viens de retrouver ce que cet ami m’avait écrit au sujet de Septentrion.

"Je pensais que vous n'aviez pas lu Calaferte et qu'en effet ce serait un grand bonheur pour vous, il me semble. Ses textes poétiques sont aussi intéressants, mais à l'instar de Céline avec "Le voyage..." (et "Mort à crédit" que j'aime aussi beaucoup) je dirais qu'il a "tout" mis dans son Septentrion.

Je pense également à un autre auteur, spontanément, que vous avez peut-être lu, et que vous aurez sans nul doute adoré, c'est Marcel Moreau. Il y a un an, environ, il a publié Nous, amants au bonheur ne croyant... (Éditions Denoël), qui est un troublant hymne à l'amour (et à sa perte qui le grandit souvent davantage). Mais ces textes antérieurs étaient tout aussi puissants. Je pense qu'avec cet auteur, d'origine belge, le lecteur touche à la "gangue" du verbe. Et son oeuvre parle de la femme comme peu d'auteurs ont su le faire.
Ainsi de Quintes (publié en 1963), Sacre de la femme, Julie ou la dissolution, Le Chant des paroxysmes....
Si ce n'est déjà fait, je vous laisse aux "Anges" de le découvrir!"

Il va sans dire que j'ai "adoré" Marcel Moreau.

"Tous les livres ne sont pas pour tous les lecteurs indifféremment. Chacun doit trouver les siens. Les trouve-t-il, c'est l'harmonie."
Louis Calaferte.

Vidéo INA et lire aussi ici.